Quand cesse la culture du profit

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4. Quitter le rapport de force - accueillir notre part d'ombre via un réel travail psychologique

 

S'il est assez simple de comprendre ce qui précède à un niveau intellectuel, ce l'est nettement moins au niveau du vécu. Or, le travail ne consiste pas tant à comprendre que nos pensées et nos émotions nous trahissent trop souvent, pour nous emmener dans des scénarios que nous ne voulons pas réellement. La tâche consiste à réaliser en direct, avec ce même mental, le moment où des émotions nous emportent loin de nos intentions et où le mental ne fonctionne plus de la même manière. Cela consiste en quelque sorte en une démarche similaire à celle d'être soul et dépendant et de décider, quand on a déjà enfilé quelques verres, de ne pas prendre le verre suivant, dans le but de redevenir sobre et totalement abstinent. Et cela, tout en sachant que cette situation se répétera. Car si avec l'alcool il est possible de décider de ne pas y toucher, ce n'est pas le cas des émotions, car celles-ci se manifestent en général sans crier gare et kidnappent instantanément notre volonté avant même que nous puissions nous en rendre compte. Ce travail n'est donc pas un apprentissage en ligne droite. Pour le faciliter, il peut être utile de comprendre le mécanisme qui est en jeu. Je vais donc tenter d'expliquer le processus en le scindant en étapes.

a - L'étape incontournable : commencer par reconnaître notre part d’ombre

 

Tacitement, nous savons tous que nous avons des défauts, que nos comportements ne sont pas toujours appropriés, que nous nous laissons parfois emporter par nos émotions, que nous faisons des erreurs, que notre perception de la réalité n'est pas forcément ou pas toujours objective. Et concrètement, nous ne sommes en général pas capables de mettre le doigt précisément là ou le bât blesse.

Et si, dans les chapitres précédents, je me réfère aux religions et à la spiritualité, c’est pour être assez explicite quant à l’idée que, adopter de nouveaux registres de fonctionnement dans la société qui est la nôtre, n’est pas uniquement une affaire de décision ou d’intention d'assainir nos comportements et notre mentalité en développant tout simplement notre altruisme. Il s’agit tout d’abord de ne plus vivre dans des conditions de survie (ce qui exige un revenu minimum) et ensuite cela exige de réellement travailler sur nous-mêmes en commençant par accepter de regarder et reconnaître notre part d'ombre.

Car s'il est indispensable de connaître les problématiques qui nous entourent, il est tout aussi indispensable de connaître la part de nous-même qui y participe en cessant de nier notre responsabilité dans ce scénario, et cela, en particulier, à un niveau psychologique.

Cependant, une fois que l'on accède à ce niveau, il est encore plus fondamental de choisir d'orienter notre énergie dans la part constructive du travail d'évolution à effectuer.

En très simplifié : travailler à aller vers le positif sans tenir compte du négatif ne fonctionne tout simplement pas. Mais une fois que l'on tient compte de cette part négative qui nous concerne, il faut très clairement éviter d'aller creuser de ce côté là, et il est nécessaire alors de nous orienter massivement vers la part positive que nous voulons atteindre. Il ne faut donc jamais baisser la garde par rapport à cette part négative qui ne ratera aucune occasion de revenir par la porte arrière, mais le principal de notre énergie doit être orienté vers la part positive dans laquelle nous voulons nous investir. Il est vraiment essentiel d'être très au clair avec ces deux aspects :

- connaître le problème sans le creuser (stopper le déni),

- et une fois le problème connu, s'orienter vers les solutions, mais sans jamais cesser de reconnaître où est le problème, sinon on retourne dans le déni ; ce qui conduira tous nos comportements à être dictés par des modes de fonctionnement problématiques.

Il est donc primordial de ne pas investir notre part d'ombre, tout en observant aussi en parallèle, qu'une part de nous n'y participe pas ; afin de parvenir à se désidentifier de la part de nous qui y reste attachée, et d'ainsi éveiller la conscience. L'idée est de devenir capable d'accueillir avec bienveillance les pensées, émotions et intentions qui relèvent de nos automatismes, instincts, pulsions, et des comportements et stratégies de comportements qui en découlent ; et de cesser de les dénier ou de les ignorer, afin d'être en mesure de pouvoir choisir notre face lumineuse.

Car si nous refusons de passer par cette étape, c'est notre inconscient qui gardera les rennes de notre mental et nous imposera d'orienter nos pensées, actions et intentions vers notre face sombre.

D'une certaine manière, il ne sert à rien d'allumer la lumière tant que nous avons un bandeau devant les yeux. Ou, en choisissant une autre comparaison : lorsque nous projetons la lumière sur notre part d'ombre, celle-ci se dilue.

Tant que nous ne serons pas capable de regarder en face, reconnaître et accepter nos colères, nos jalousies, nos ressentiments, nos jugements, nos erreurs, nos échecs, et tous ces aspects que nous n’aimons pas voir de nous-mêmes ; nous serons forcés de rester tributaires de leurs conséquences souvent insidieuses, malgré nos bonnes intentions, et nous persévérerons dans des attitudes et comportements et stratégies basés sur les instincts, les automatismes, les habitudes ou les conditionnements, et nous utiliserons les mauvais moyens pour tenter de nous en débarrasser :

Le travail d'évolution qui va nous rendre la capacité de pratiquer des comportements sous-tendus par des valeurs élevées (compassion, altruisme, amour, empathie, entraide, solidarité, générosité, respect, don de soi, abnégation, authenticité, intégrité…. ), n’implique pas seulement une décision, une intention, et de la bonne volonté ou des efforts et de la pratique. Tant que nous n’accepterons pas d’aller voir de l’autre côté du miroir et de faire face à ce que nous y trouverons, toutes nos attitudes négatives ne cesseront de revenir et de dicter nos comportements en sapant systématiquement nos choix et intentions.

Et ce n'est qu'à cette condition - de devenir plus conscient - que la prééminence du rapport de force dans toutes les relations de la société à tous les niveaux, pourra être écartée. Les inégalités, les injustices, la pauvreté matérielle, créées par la richesse matérielle, et toutes les autres conséquences plus vastes encore ; ne pourront être résolues tant que l’être humain continuera à se comporter comme un gamin qui fait semblant d’être sage et ne fait que désobéir et mentir.

L’être humain est encore un enfant et se prend pour un adulte en s’octroyant tous les droits et en détruisant tout sur son passage. Sauf qu’à l'âge de la majorité et au-delà, il n’est plus pris en charge ni cadré dans certaines limites d'un système éducatif comme la famille ou l’école. Et que le seul moyen pour s’éduquer lui-même est l’essai et l’erreur et qu’il lui faut mordre la poussière, prendre le tapis, se fourvoyer complètement, et en payer le prix au niveau collectif. Sa seule voie de salut est de mûrir en prenant conscience de sa propre responsabilité à y parvenir. Et cela ne peut se produire au niveau collectif qu’au prix de le réaliser en premier au niveau individuel par une partie non négligeable des individus.

b - Part d’ombre et rapport de force

 

Bien que notre part d'ombre désigne un concept plus large que l'usage récurrent du rapport de force, j'ai choisi d'utiliser tout de même l'expression car à mes yeux, nos capacités à l'amour, l'altruisme, l'empathie d'un côté ; et nos sempiternels recours au rapport de force, de l'autre ; sont deux aspects intriqués l'un dans l'autre. L'ombre existe grâce à la lumière. Il en va de même pour nos capacités de cœur et le recours au rapport de force. Nous ne sommes en mesure d'entrer réellement dans le cœur, que si nous avons vécu dans le rapport de force. Tant que nous ne sommes pas vraiment conscients que nos émotions, nos croyances, nos automatismes et conditionnements nous empêchent d'écouter notre cœur, il nous est impossible d'enraciner notre choix d'aller vers la lumière.

Quelles que soient les difficultés que l'on peut rencontrer dans une relation ; elles seront presque toujours contaminées par la présence d'un rapport de force. Et ce qui caractérise l'aptitude à surpasser ces difficultés, c'est en général la capacité, de ne fut-ce que par l'un des protagonistes, de quitter ce rapport de force. Et dès lors, ceux qui effectuent un travail en ce sens amènent les autres à évoluer.

Je vais donc parler ici de la manière d'aborder, au niveau individuel, cette tendance aux jeux de pouvoir. Car si on peut en guérir individuellement, on parviendra alors ensuite à pratiquer cela au niveau collectif avec bien plus de chances de succès, avec un effet d'entraînement des uns par rapport aux autres.

c - Parvenir à déjouer l'emprise négative de certaines de nos émotions et de leurs conséquences sur nos pensées et nos comportements

 

Chacun de nous traverse dans son quotidien des plages de bienveillance plus ou moins larges, en fonction de son éducation, de son expérience et de son milieu de vie. Et quitter la mentalité du rapport de force consistera principalement à devenir conscient, et cela de manière récurrente, au quotidien, à chaque fois que nous quittons notre sérénité, notre bienveillance, et basculons dans des comportements de défense, même les plus minimes.

Le rapport de force s'inscrit dans des modes de fonctionnement en grande partie conditionnés et instinctifs. En cas de difficulté, impliquant des émotions de peur, de frustration, de honte, ... - nos pensées surgissent automatiquement sans que nous en fassions le choix. Et ces pensées vont très souvent déclencher des comportements négatifs que nous ne choisissons pas non plus. C'est automatique, ou "plus fort que nous". C'est une part du cerveau plus primitive - le cerveau limbique - qui s'en charge et fait fonctionner différemment notre cortex cérébral, siège de la réflexion, en détournant et limitant son fonctionnement. L'émotion, lorsqu'elle ne peut mener à une action efficace directe par rapport à la situation qui l'a provoquée ; va forcer les pensées à entrer dans une ornière, qui se maintient dans le temps, tant que les hormones liées à l'émotion sont présentes dans le sang, et parfois bien plus longtemps encore. Cela fonctionne un peu de la même manière que la mélodie d'une rengaine entendue à la radio dès le matin, qui nous poursuit toute la journée, contre notre volonté. Et cela peut même parfois tourner à de la rumination où l'on se trouve piégé dans nos pensées négatives et nos émotions, comme le hamster dans sa roue - quand chaque pensée négative entraîne d'autres pensées négatives ; ce qui fait qu'on ne parvient plus du tout à quitter l'humeur qui se nourrit d'elle-même et peut nous emprisonner des jours, des mois, des années.

Dès lors, cela peut mettre beaucoup de temps pour parvenir à devenir conscient de ce processus. En général, on s’en rend compte a posteriori, lorsque l'on est revenu à une attitude mentale plus sereine, plus bienveillante.

Et il est d'autant plus difficile d'être conscient que nos pensées sont influencées par de telles émotions, du fait que ces émotions impliquent toute une production hormonale. Donc cela s'inscrit dans le corps. Et cela peut persister des heures dans le corps, et rendre impossible de retrouver la sérénité, qui elle, permet l'utilisation habituelle du cortex. Car même lorsque l'on prend conscience qu'on est pris au piège d'une émotion, et qu'on désire en sortir, le stress lié à cette émotion est marqué dans notre corps et ne va pas nous lâcher par simple décision.

Quant aux stratégies ou conditionnements, lors d'un événement problématique déclencheur ; il est possible qu'un mécanisme automatique vienne empêcher l'émotion de faire surface, et amène notre cerveau à fonctionner sur la défensive, sans que nous en soyons conscient. Nous pouvons dès lors être calme et serein face à un événement qui, pour nous, représente un danger (qui nous stresse, nous inquiète, nous contrarie) et adopter toute une série de comportements qui vont servir à empêcher l'émotion de survenir, donc empêcher l'impression de danger de se manifester de manière plus importante. C'est dans ce cadre qu'interviennent les jugements et les critiques très négatifs (condamnant) les mensonges, les manipulations, les attitudes dictatoriales, les reproches et projections, les fuites en avant, les lâchetés, les mises devant le fait accompli, et bien d'autres.

L'apprentissage de la prise de conscience de l'émotion et des pensées qu'elle nous impose, et qui nous mène vers l'utilisation de rapports de force ; cet apprentissage débute lorsque l'on commence à se rendre compte - seulement après l'avoir quitté - du scénario dans lequel nous avons été piégé.

Plus tard, la conscience du phénomène va commencer à apparaître pendant que l’on est aux prises avec nos pensées et émotions incontrôlées. Cela crée alors une sorte de conflit intérieur, car la partie instinctive s'avère être plus puissante que le fait de commencer à deviner que l'on est dans ce processus. On apprend donc à naviguer avec ces éclairs de lucidité qui vont amener la mise en doute de toutes les pensées qui nous traversent à ce moment-là. Et l'on commence à décaler légèrement nos comportements. Et il est très difficile de ne pas croire nos pensées, car lorsque l'on est dans une émotion vive - ce qui est souvent le cas lors de colères et de peurs - les pensées qui accompagnent ces émotions nous apparaissent comme extrêmement évidentes. Plus on expérimente ces prises de conscience alors que nous sommes dans l'émotion, plus on apprend à traverser alors la situation tout en tentant d’agir le moins possible dans cet état d’esprit. Et c'est plus difficile encore dans le cas des stratégies, vu que nous n'avons pas accès lucidement à l'émotion qui est en jeu, et nous nous sentons dans notre bon droit, quelque soit le comportement négatif que nous avons mis en place.

Et il arrive un jour où, au moment où on est en train d'entrer dans l'état d’esprit émotionnel ou stratégique, on en prend conscience immédiatement. Cela permet d’y entrer de manière moins brutale, moins intense ou moins complète, et de pouvoir éviter d’agir de manière nuisible, ou en tout cas en adoptant une attitude bien plus inoffensive. Et cela permet d’en sortir plus rapidement.

Rem : la technique de l'élastique, L'EFT, le sourire, certaines méditations guidées de lâcher prise, plusieurs techniques proposées dans le programme Gupta, peuvent alors aider à quitter plus rapidement tant l'émotion, que l'état d'esprit qu'elle provoque.

Et finit par arriver enfin un jour, où la prise de conscience prend place avant que n'ait pu s'enclencher l'émotion et le mode de pensée automatique ; ce qui permet tout simplement d’éviter d’y entrer.

Et il est important aussi de savoir qu'avec l'âge, ce processus négatif devient plus coutumier si l'on n'a pas effectué un travail sur soi. Et les chocs et les blessures de la vie se multipliant avec le temps, il en résulte que des aspects traumatiques vont rendre les pièges émotionnels décrits ci-dessus bien plus ancrés dans nos habitudes. Et lorsque ces aspects traumatiques finissent par fonctionner de concert, c'est alors un système de réactions négatives qui finit par nous coller à la peau. Cela rend le processus nettement moins gérable, et exige un travail nettement plus intense, en général via des thérapies. Et dès lors, cela ne consiste plus en un apprentissage ou en un changement d'habitude, il faut carrément alors en guérir.

C'est pourquoi en avançant en âge, on peut remarquer chez certains une tendance à se refermer, à juger, et à réagir négativement, par la peur ou la colère, même sans réel événement déclencheur et chez d’autres, plus résilients, une sagesse, une ouverture, une capacité à relativiser et une tendance à l'indulgence envers autrui. Avec la possibilité que ces deux aspects puissent aussi cohabiter. Mais dans ce cas, chacun se manifestera dans des domaines de vie différents. Et Il s'agit de tendances, personne n'est réellement sevré de réactions négatives, ou à l'inverse totalement embrigadé dans ces dernières, excepté lors de certaines maladies neurologiques liées à l'âge.

Le chemin d'apprentissage à reconnaître nos émotions, nos pensées, et devenir capable de ne plus entrer dans les jeux de pouvoir qui en découlent, nous concerne tous. Et plus il y aura de personnes qui auront choisi de travailler à évoluer en conscience, plus cela facilitera ce processus pour tous, et mieux les techniques pour y arriver pourront être développées et exploitées.

Et ce chemin n’est pas linéaire. Après les premiers succès viennent encore des échecs. C’est un travail de longue haleine et de persévérance.

Et si jusqu’à présent, ce sont en général les crises et les catastrophes qui peuvent nous réveiller de cette emprise de notre part d’ombre ; nous arrivons actuellement à un stade où cela devient plus accessible en choisissant d’effectuer un travail sur soi-même par le biais de la méditation et grâce à pas mal de techniques psycho-énergétiques récentes qui peuvent amener à questionner ces dérives de comportements et à les quitter bien plus rapidement.

Comme les émotions sont impliquées dans ce processus, cela implique également d'adopter une hygiène de vie (alimentation, exercice physique, qualité du sommeil, etc.) la plus correcte possible. Car nos émotions sont tributaires de ce que nous faisons subir à notre corps. Manger sucré par exemple facilite l'apparition de l'agressivité ou de la violence. L'exercice physique quant à lui aide à détoxiner et donc à moins stresser, et à purifier notre corps. Tout cela joue sur la fatigue, le stress, la rapidité à entrer dans des émotions, et par voie de conséquence, influence grandement le contenu de nos pensées, et donc les choix que nous faisons, et nos comportements.

J'aurais pu aller bien plus loin dans les explications concernant nos tendances à switcher vers des émotions nocives qui nous mènent à faire usage de pouvoir ou de soumission vis-à-vis de notre entourage ou dans des contextes nettement plus larges. Mais je crains que je perdrais la majorité des lecteurs tellement cela s'éloigne du thème de base : le profit, et les dysfonctionnements dans nos sociétés. J'ai tout de même ajouté une annexe sur la théorie polyvagale proposée par Stephen Porges, l'un des pionniers dans ce domaine, qui a permis d'établir des liens très clairs entre les neurosciences et la psychologie. C’est une des directions qui permettent d’approfondir les sujets que je viens d’évoquer pour mieux comprendre le lien entre notre mental et notre fonctionnement physiologique qui interfèrent l’un avec l’autre.

Je reste convaincue que c'est là - via l'élévation de conscience individuel - que se joue notre futur à tous. Ça passera ou ça cassera. Nous évoluerons dans notre capacité à nous éloigner des rapports de force, ou nous nous détruirons dans les guerres, les pénuries, les catastrophes que nous aurons nous-mêmes engendrées, sans être capables de cesser de répéter les erreurs du passé, en continuant à envoyer vers la mort des centaines de millions d'humains, par nos inerties, nos mauvaises fois, notre complaisance avec les puissants, et notre attachement à nos privilèges.

d - Les attitudes mentales à privilégier

 

En amont de nos réactions émotionnelles ou stratégiques automatiques que nous pouvons apprendre à gérer, il y a aussi toutes sortes d'automatismes de pensée et de choix, que nous pouvons décider volontairement de transformer, afin d'éluder le déclenchement de ces réactions émotionnelles porteuses de conflits.

Tout d'abord, pour éviter d'entrer dans le rapport de force, quand nous poursuivons un objectif et qu'il est en partie dépendant d'autres personnes ou instances qui n'y sont pas forcément favorables ; il est nécessaire d'adopter trois attitudes mentales :

Nous y reviendrons plus loin.

Fonctionner dans ces perspectives permet d'éviter plus facilement les conflits et rivalités ou d'en diminuer l'intensité et les conséquences. Et c'est ainsi que peuvent alors advenir les innovations, les réalisations, les accomplissement, les succès, les résolutions les plus improbables.

Dans un contexte plus large, ces attitudes permettront aussi plus aisément de prendre le parti de construire autre chose, sans chercher à détruire ou s’opposer à ce qui existe déjà. Cela nécessite, comme déjà mentionné, d'être capable de raisonner en dehors du mode de pensée lié au problème. Lorsque les nouvelles solutions émergent, si elles sont justes dans leur essence, elles sont vite adoptées par ceux qui sont prêts, et elles aident à transformer les mentalités sans rien forcer. Plus elles seront pratiquées, plus les personnes qui y adhèrent se désinvestiront des modes de fonctionnement du système devenu obsolète. Et ce dernier perdra de sa force, sans lutte et sans destruction.

Je reprécise une fois encore que, face à des crises aiguës, lorsqu'il y a réellement danger et/ou violence, rien de tout ceci n'est valable, pas plus que lorsque nos libertés sont réduites par des menaces violentes. Mais la toute grande majorité des désaccords ou conflits dans la société, à tous les niveaux, se déroulent en général hors de ces cadres. Et c'est la raison pour laquelle c'est à ce niveau-là que le changement doit s'opérer. Et quand la résolution de différends sans recours aux rapports de force commencera à se généraliser, alors automatiquement la fréquence et la gravité de conflits plus violents et destructeurs vont diminuer. Car c'est la mentalité générale qui aura évolué. Dès lors ceux qui apprennent à s'éloigner des rapports de force dans toutes leurs actions et relations, font un travail qui entraînera les autres à y arriver aussi.

Et une des difficultés majeures pour y parvenir réside dans la capacité à distinguer les réels dangers, de fausses menaces engendrées par nos émotions et pensées (ce que l'on appelle les émotions et les pensées irrationnelles), qui nous trompent et nous entraînent à y réagir plutôt que de réagir sainement à la situation réelle.

Le cheminement pour faire face à nos pensées et émotions intempestives qui sabotent notre bienveillance et notre bonne volonté envers autrui, et pour abandonner le sempiternel recours aux attitudes régies par le rapport de force (domination comme soumission) ; ce cheminement commence par l'apprentissage de l’acceptation de ce qui est. Il s'agit d'un processus à intégrer et se fait par étapes, que voici :

i Accepter

 

Dans tout type de relation, lorsque nous voulons faire valoir nos opinions, nos demandes, nos besoins, nos limites ; il est possible d'apprendre à orienter nos actions dans un tout autre registre que ceux de l’opposition et de la résistance à ce qui est ou aux pouvoirs en place. Cela demande de devenir capable de quitter l’urgence apparente de la situation qui nous occupe, même lorsque tous les signaux sont au rouge.

Lorsque l'on réagit de manière impulsive face à une situation, on agit alors en fonction de nos émotions (peurs ou colères principalement), de manière brute, sur la défensive. Or ce genre de comportement va, contrairement à nos attentes, susciter le plus souvent de la résistance de la part de ceux qui nous font face, soit via le déni du problème, soit via leur inertie, soit encore via une réaction violente ou abusive de leur part en retour.

L’alternative à l’attitude défensive, d’opposition ou de résistance, qui a le plus de chance de fonctionner sera celle issue du cœur. Elle consiste en premier à accepter ce qui est, sans prendre ni la voie de l’impuissance, ni celle de la soumission ni encore celle de l’opposition. Juste, celle de l’acceptation. Ce premier pas est déjà fondamental et sans doute le plus difficile. Car le sentiment d’impuissance mêlé à de l’indignation ou de la peur est très difficile à gérer, et la soif d’agir « contre » ou de fuir dans l’urgence est énorme. Il s'agit dès lors, de devenir capable de regarder nos peurs, colères, frustrations et autres émotions négatives dans une bienveillance orientée vers nous-même, de les accueillir, de voir qu'une part de nous n'y participe pas, et de se désidentifier de l'autre part de nous qui nous dicte d'agir dans l'urgence - excepté dans les situations réellement urgentes, mais qui sont nettement plus rares que nous ne l'imaginons. Cela implique de parvenir à ne pas écouter cette pulsion à réagir trop vite. C'est la clé qui ferme la porte de l’attitude d'opposition et permet par là-même d’ouvrir toutes les autres portes, moins immédiates, mais qui feront toute la différence.

ii Persévérer à demander

 

Au delà de l'acceptation, il y a les initiatives que l'on peut choisir de prendre hors des champs de l'opposition, de la fuite, du chantage, de la manipulation, etc. Dans une situation donnée que nous voulons modifier, face à un interlocuteur, chaque fois que nous exprimons une proposition, et argumentons en ce sens ; cela vaut la peine de se poser la question de savoir si l’on est prêt à accepter que cette proposition soit refusée ; de se demander si l’on est prêt à ne rien faire pour forcer à aller vers notre idée ou notre opinion, si l'on est prêt à attendre et rester dans l'inertie. Si nous y sommes prêt, alors nous serons à même de faire preuve de persévérance, de persister à la proposer, en sachant qu'un jour ou l'autre, cela finira par aboutir, même si ce n'est pas de la manière dont nous l’avions proposée à l'origine.

Cette attitude d’attente et de persévérance est fondamentale. Car habituellement, la plupart du temps, c'est tout l'inverse qui se produit : nous n’acceptons pas d’attendre. Notre impatience est à la taille de notre indignation face au problème, et nous voulons à tout prix agir dans l’urgence. Et agir dans l’urgence nous mène à faire n’importe quoi : soit à agir violemment, agressivement, ou de manière détournée, insidieuse, perverse ; soit cela nous mène à brasser du vent sans que cela ne porte aucun fruit. Et c’est ce qui arrive le plus souvent avec les mouvements citoyens de résistance. Plutôt que de choisir des actions qui mènent vers des solutions, ils s’orientent vers des pseudo solutions qui consistent à tenter d’exiger (sans avoir le pouvoir qu’implique une attitude d’exigence), et à s'agiter et à faire du bruit, (or tenter de se faire voir ou entendre par des gens qui portent des œillères et se bouchent les oreilles : cela n’aide en général pas beaucoup). Être persévérant à s’agiter dans le vide ne mène pas bien loin. Et nous l’avons vu, les gens au pouvoir sont particulièrement doués pour se boucher les oreilles et se bander les yeux face aux mouvement contestataires, même si en façade ils prétendent se montrer interpellés et coopérants. Et le rapport de force est rarement suffisant pour les obliger à écouter. Ce qui signifie qu’agir à faire du bruit est tout simplement vain, dans la toute grande majorité des cas.

Je caricature la situation en expliquant cela, car l’influence des mouvements citoyens qui s’opposent de front aux politiques pratiquées par les gouvernements n’est pas totalement sans effet. Mais les résultats sont extrêmement lents et peuvent prendre des décennies voire plusieurs générations, et dans certains cas des siècles ou des millénaires, pour aboutir.

Quant aux mouvements qui s’opposent violemment aux politiques exercées par des gouvernements ; s’ils n’ont pas le dessus, ils agissent tout simplement contre eux-mêmes. Car la violence, dans ce cas provoque le renforcement des convictions de ceux contre qui elle est exercée.

Et, comme je l'ai déjà évoqué, beaucoup de gens qui tentent de pratiquer la non-violence dans les mouvements activistes, le font en persistant à inscrire leurs actions dans le rapport de force. Et en ce sens, je pense qu’ils sont très loin du concept de non-violence.

La désobéissance civile, par exemple, est considérée comme une alternative non-violente. Elle l’est dans certains cas. Lorsque l’on transgresse des lois pour créer une situation plus juste, ou pour empêcher directement une situation injuste d’être appliquée. C’est le cas lorsqu'un passager refuse de s’asseoir dans l’avion pour protester contre la présence d'un sans papier, renvoyé de force dans son pays d’origine où il court un danger grave pour sa survie. C’était aussi le cas lorsque Rosa Parks a refusé de céder sa place à un « blanc » dans un bus de la ville de Montgomery aux États-Unis en 1955. C’était aussi le cas lorsque Gandhi a mené la foule vers la côte pour la « marche du sel » en 1930. Ils contreviennent aux lois, mais l’action qui contrevient aux lois participe directement à rétablir une forme de justice que la loi empêche.

C’est nettement moins le cas lorsque l’on contrevient à une loi dans le cadre de manifestations alors que manifester ne participe pas, par l’action même, à rétablir une forme de justice que la loi empêche, et que dès lors, contrevenir à la loi est une provocation creuse qui, par le fait qu’elle ne porte pas intrinsèquement la revendication demandée, stimule presque inéluctablement une réponse violente de la part des autorités. D’autant plus qu’il existe des moyens de manifester sans contrevenir aux lois.

Et cela démontre, à l’inverse, que le but implicite (et en partie inconscient) des manifestants est de stimuler cette violence (de la part des autorités par l'intermédiaire de la représentation policière), sachant que cette violence sera publiquement condamnée et pourra faire avancer la cause des manifestants.

Car stimuler la violence de manière implicite est déjà une forme de violence, et en aucun cas de la non-violence. Dans ce domaine, la limite entre la violence et la non-violence peut paraître parfois bien mince, et mener à des quiproquos. Une fois que l'on comprend mieux le fonctionnement guidé par les rapports de force, on est mieux à même de faire de réels choix non-violents.

Demander est donc fort différent d'exiger et de chercher à utiliser la force pour obtenir. Accepter par avance la possibilité du refus, nous met dans l'état d'esprit de rectifier notre démarche. Il y a tout d'abord la possibilité de réitérer la demande. Mais il y a aussi toutes les possibilités de faire évoluer la demande, avec persévérance, de manière à la rendre plus acceptable pour la partie adverse, ou pour donner le temps à la partie adverse d'accepter cette demande, et parfois aussi de nous donner le temps à nous-même de mettre de l'eau dans notre vin.

Je ne donne pas d'exemple précis pour les situations plus personnelles, mais nous en rencontrons tous. Car quitter les rapports de force se fait à tous les niveaux et pas uniquement au niveau citoyen et politique. Nous rencontrons des situations, dans tous les registres de nos vies, qui déclenchent des émotions nocives.

Remarque : En réalité, ce ne sont pas des émotions qui par nature sont nocives, la nocivité réside dans leur persistance et le fait que nous en sommes inconscients.

J’utilise le terme « nocif » car, tant que nous n’avons pas appris à les reconnaître et à les gérer correctement ; elles faussent nos raisonnement, nous mènent à agir de manière aveugle, elles nous font souffrir inutilement en fonctionnant en cercle vicieux. Dès lors, elles ne nous servent pas et nous font du tort. C’est donc la persistance des émotions qui est nocive et le fait que nous en sommes inconscient.

Sinon les émotions ont un rôle positif à la base quand on apprend à les reconnaître, à les gérer, à les utiliser comme source d'action constructive, car elles peuvent nous aider à clarifier nos besoins.

Et il est presque toujours possible de rebondir en douceur et constructivement. Cela s'apprend, et plus on maîtrise cet apprentissage, plus nombreuses seront les situations pour lesquelles cela pourra être appliqué.

iii Faire évoluer les demandes et propositions en traversant les échecs, en apprenant de nos erreurs

 

Face à une situation sociale, relationnelle ou collective, qui nous frustre, nous contrarie, nous indigne, nous est néfaste ou est néfaste à autrui, et dont la résolution dépend de la coopération ou de la décision d'une tierce personne ou entité ; si nous voulons parvenir à l'accepter, et continuer à faire des propositions pour la résoudre, sans s’agiter dans tous les sens, sans tenter le rapport de force ; cela exigera de nous, à un niveau individuel, d’avoir quitté les registres des actions impulsives et de s’ouvrir à plus de créativité. Et cela exige aussi la confiance, la persévérance et la détermination.

Et quand ce que nous proposons peut convenir à tous, en général nous le pressentons. Mais pour y arriver, il faut souvent avoir la patience d’expérimenter, d’adapter, de retravailler dans tous les sens, le projet avant que cela ne puisse essaimer. D’une certaine manière, tant que ce que nous proposons n’est pas accepté, nous avons intérêt à revoir notre copie, pour, à chaque fois l’améliorer ou trouver tout autre chose à proposer. Donc la persévérance et la détermination se dissocient ici de l’entêtement. Persévérer consiste à persister dans une direction, mais en continuant à évoluer, à innover, à être capable de changer de cap tout en gardant la même intention. Et c'est bien l'acceptation de rester et se maintenir dans un statu quo, qui permet la flexibilité et la patience de poursuivre dans les remises en question et l'évolution de notre démarche. Car lorsque l'on reste dans une attitude mentale rebelle, en s'opposant à autrui, on ne peut que se limiter à une solution, la nôtre, l'unique possible. Et ce manichéisme nous maintient dans le rapport de force, car cela nous interdit l'accès à la créativité et l'intuition, et suscite en face de nous le refus et l'attitude défensive qui entraînent une surenchère dans l'incompréhension d'un côté, et dans les attitudes d'exigence et d'obstination de l'autre ; qui sont les piliers du rapport de force et de la stagnation de l'évolution.

Or l'utilisation de la persévérance et de la patience face à l'adversité, est un mode de fonctionnement qui met du temps à se mettre en place. Car il implique une évolution non seulement dans les comportements au niveau individuel, mais aussi dans la mentalité. Et cela se fait par expérience, par essais et erreurs, avec parfois des échecs qui imposent de tout recommencer à zéro, ici ou ailleurs.

D'une certaine manière, lorsque l'on quitte l'attitude figée de l'exigence, de l'attente immédiate d'une réponse qui nous convient, au delà aussi de la négociation et de la médiation ; nous commençons alors à nous mettre dans la disposition d'esprit d'apprivoiser la situation, et de chercher des réponses qui sortent du cadre tout blanc ou tout noir, pour parvenir à choisir dans toute une palette de couleurs.

iv Accepter dans certains cas la solution de l'autre qui ne nous satisfait pas, mais peut mener vers nos objectifs

 

Nous l'avons vu au chapitre 4 : une solution qui ne porte pas - toute rationnelle qu'elle puisse être - n'est pas une solution. Lorsque nous sommes dans l'incapacité de faire adopter notre point de vue, il est parfois nettement plus intéressant d'accepter cet état de fait, et d'accepter les solutions apportées par d'autres, en sachant que cela sera peut-être moins efficace ou plus lent ou plus difficile ou frustrant, mais que cela nous mènera malgré tout à atteindre notre objectif. Et si notre soif de pouvoir nous guide à vouloir imposer notre point de vue ; notre humilité et notre patience peuvent à l'inverse nous mener à baisser nos exigences et ne pas créer de confrontations inutiles, dans le but même d'atteindre l’objectif commun et de garder la confiance et la bonne entente.

e - Se mettre dans la bonne disposition d'esprit

 

Encore en amont des attitudes mentales à privilégier pour s’éloigner des rapports de force, décrites ci-dessus :

il est aussi nécessaire de se mettre dans la bonne disposition d'esprit pour permettre d’ouvrir de nouvelles perspectives et d'accéder à la réalisation de notre intention. La véritable attitude non-violente, celle qui quitte le rapport de force, réside essentiellement dans l’intention qui se trouve à l'origine d'un projet, d'une demande, d'une proposition, d'une volonté de changement. Cette intention est reconnaissable à plusieurs aspects, qui se superposent partiellement, ou s’influencent mutuellement :

1. la détermination

2. l’absence d’exigence

3. l’absence d’urgence

4. une forme de connaissance de soi

5. le détachement

6. la présence de doutes dans la confiance

7. le respect et une bienveillance absolue

C’est l’intention qui va définir le choix des moyens pour atteindre les objectifs. C’est elle qui va déterminer, en fonction de ces 7 aspects, si l’on quitte ou non le raisonnement déficient. Elle porte donc en elle tout le potentiel de la transformation à réaliser, et cela exige tout un apprentissage pour devenir capable d’adopter des comportements calqués sur une telle intention, dans le plus de situations possibles.

i La détermination

 

Quelles que soient les circonstances - la réponse qui est faite à nos actions ou nos demandes - il est essentiel de maintenir nos objectifs. Cela veut dire qu’il est important de maintenir la meilleure attitude possible face au déni, face au refus, face à l’indifférence, face à la violence, ou encore face à l’échec. Quels que soient les obstacles que nous rencontrons, sur le métier, 100 fois nous aurons à remettre notre ouvrage. Et c’est notre créativité, notre intuition, notre inspiration, notre expérience, notre persévérance, qui nous dicteront les modifications nécessaires à apporter aux moyens que nous mettons en œuvre pour atteindre ces objectifs. En ce sens, les aspects d’exigence, de vengeance, d’indignation, de sentiment d’injustice, s’ils sont à la source de notre désir d'agir ; ils ne peuvent être les moteurs de nos intentions et de de nos comportements.

Et il se peut que notre cheminement nous mène à évoluer dans nos intentions, et puissent malgré tout les changer. Mais dans ce cas, ce ne sera pas faute de détermination, car il ne s'agira pas d'abdiquer, de renoncer ; mais bien de réorienter nos objectifs pour les adapter aux circonstances, tant extérieures que intérieures.

ii L'absence d'exigence

 

Si nous n'agissons pas dans le cadre d'un rapport de force, il devient impossible d'exiger quoi que ce soit. Faire la différence entre une demande et une exigence fait donc aussi partie de l'apprentissage. Nous la connaissons tous dans la théorie. Mais pratiquer cela est tout autre chose. Quand on sort des comportements basés sur les exigences, bien souvent, on ne formule même plus de demandes : on emprunte d'autres chemins.

Une différence parfois difficile aussi à percevoir est celle qui existe entre exiger et mettre sa limite. La non coopération est une manière de mettre sa limite, tant que l'intention qu'il y a derrière n'est pas d'impacter directement le comportement, les choix et les actions de l'interlocuteur (quel que soit le niveau où cela se produit). Si je refuse de coopérer dans le but d'obtenir de mon interlocuteur qu'il finisse par suivre mon idée, je ne suis pas en train de mettre ma limite, mais je joue plutôt un jeu de chantage.

Si à l'inverse je ne coopère pas parce que coopérer va à l'encontre de mes convictions, et que je ne cherche pas à stimuler une réaction chez l'autre ; alors je reste dans un processus plus éloigné du rapport de force.

C'est la manière de refuser de coopérer qui permettra à la personne (ou le groupe, la nation) qui nous fait face, de comprendre dans quel registre nous agissons, avec ou sans exigence.

Même si, bien souvent, la non coopération est comprise comme du chantage, voire une agression, de la part de ceux qui se sentent lésés ou confrontés par cette non coopération.

Et j'aimerais illustrer cet aspect dans le domaine de la "lutte" féministe, et plus particulièrement lors d'un événement qui s'est déroulé en 2020 lors de la remise des Césars à Paris. Cet exemple n'apporte pas la solution, mais il illustre de manière très profonde à quel point la demande, l'exigence de changement, ne peut être entendue, et amène la résistance et la persistance de la situation problématique :

Les professionnels du cinéma français ont fait la preuve de l'inertie des mentalités et de l'inefficacité des dénonciations de certains grands noms dans les médias.
Face aux abus sexuels dans le milieu, les actions féministes ont appelé au changement, l'ont même exigé. Des femmes ont manifesté, se sont exprimées, se sont indignées, ont porté plainte ; mais la mentalité qui a permis que ces abus se produisent et qui a protégé leurs auteurs jusqu'ici, n'est pas prête à évoluer. « What you resist persist ». La 45ème cérémonie des Césars de février 2020 en a été une démonstration assez percutante. Dans ce cas précis les médias avaient relayé les dénonciations, la présentation de la cérémonie n'a cessé de revenir sur ce thème comme si le sujet était entendu et faisait presque partie du passé. Et pourtant la majorité des professionnels, y compris des femmes, ont voté et fait gagné l'un des Césars les plus valorisés à l'un des protagonistes de ces abus dénoncés.
Et c'est une erreur courante. Il arrive qu'en effet, dénoncer suffise à apporter un changement de cap, car devant une évidence, il devient impossible de ne plus en tenir compte. Mais ce n'est pas une règle absolue car certains dénis et jeux de pouvoir peuvent interférer. Et lors de la remise des Césars il a été clairement démontré que les lignes n'avaient pas encore bougé. Tout est encore à faire.
Dans le cadre de la domination masculine, il est important de comprendre que les hommes - et pas mal de femmes complaisantes - ne vont pas comprendre et changer parce qu'on le leur demande. Et plus on le leur demande, plus ils résisteront. Même si, en surface ils font bonne figure comme s'ils avaient bien compris.
C'est aux femmes à remettre d'abord en question les rôles qu'elles acceptent de jouer dans ce jeu qui ne leur convient pas et où on ne les respecte pas. Car accepter le rôle en demandant d'être respectée, n'est pas si loin que le fait d'accepter d'entrer dans la chambre, et au final se faire abuser. Et le cinéma, et les dénonciations qui s'y jouent actuellement, n'est rien d'autre que la métaphore de la réalité plus vaste de la domination masculine : la partie visible de l'iceberg.

Car cela s'inscrit en effet dans un cadre plus large, où ne sont visibles que les violences et les injustices extrêmes, telles que le viol, les féminicides, le harcèlement, les mutilations génitales, et autres abus et agressions ; qui ne sont que les signes brutaux et flagrants d'une réalité moins visible, sombre et pernicieuse, que toutes les femmes subissent, et que nous avons tous intégrée, tant les hommes que les femmes, comme faisant partie de la normalité.

Les femmes ne changeront pas les hommes. Cela fait des décennies que les plus féministes croient pouvoir le faire, et elles ne cessent encore et encore, de se prendre les claques de l'absolue inertie dans les mentalités. Si les règles du jeu ne sont pas correctes, ce ne sont pas à ceux à qui elles bénéficient qu'il faut demander de les abolir, c'est à celles qui en subissent les dégâts d'apprendre à cesser de les suivre. Et quand tout le monde ne suit plus les même règles, le jeu est amené à évoluer. Et seulement alors les remises en question concerneront tout le monde.

Et pour arrêter de nous soumettre aux rôles que nous imposent les hommes, et la société, il y a des remises en question, des prises de consciences préalables à effectuer par les femmes. Et cela met du temps.
Par exemple, tant que nous accepterons de souffrir pour être belles (lisez : de se montrer pour ce que nous ne sommes pas dans le but de nous faire aimer par les hommes), nous serons aussi obligées d'accepter de souffrir de ne pas être respectées. Et il s'agit de la même chose. Tant que les femmes continueront à suivre les règles du jeu imposées par une société qui donne tous les privilèges et pouvoirs aux hommes, elles en subiront tous les abus.

Les femmes ont parfaitement intégré énormément de non-dits, d'injonctions, de doutes sur elles-mêmes - et cela de manière totalement inconsciente - et ce n'est ni en demandant que cessent les injustices, ni en se rebiffant, qu'elles obtiendront gain de cause. C'est en déblayant un à un ces comportements complaisants avec le machisme, et en cessant de participer à ce qui ne leur convient pas qu'elles y arriveront.

Pour éviter tout malentendu, il n'est pas question ici de refuser de dénoncer les pires crimes et injustices faits aux femmes, ou de refuser d'exiger les lois qui pourront les faire baisser ou disparaître. Il est bien plus question d'arrêter de se soumettre à des lois implicites sans avoir à exiger de ceux qui en bénéficient ou qui manifestent de la complaisance à cet égard, de changer leur comportement.

S’attendre, après avoir dénoncé des abus, à ce que les abuseurs perdent la reconnaissance de leurs pairs, n’est pas efficace (sauf exceptions). Quitter le jeu, l’est nettement plus. Mais ce n’est pas toujours clair que cette possibilité corresponde à nos réelles intentions, et ce n’est certainement pas la plus facile à adopter.

Je ne peux pas prétendre qu'il ne faille jamais lutter face à certaines dominations. Mais il vaut mieux le faire alors en conscience, en fonction de l'urgence, et dans des circonstances où la survie est en jeu. Dans toute autre situation il va nous falloir apprendre à refuser de rentrer dans nos réactions instinctives, et à pouvoir faire appel à toutes nos autres facultés, en mettant en défaut l'impatience qui nous presse à agir.

Lorsque nous trépignons devant une situation qui ne nous convient pas, nous avons plus de chances à en sortir en questionnant notre propre attitude, nos propres intentions, les moyens que nous voulons mettre en œuvre pour la quitter ; qu'en exigeant tout de go qu'elle cesse alors que nous n'avons aucune autorité sur celui, celle ou ceux qui en sont à l'origine. Et pour cela il faut aussi questionner notre impatience.

iii L’absence d’urgence

 

Devant des faits, tels que des événements, des comportements, ou des circonstances, inacceptables à nos yeux, et en dehors de cas graves liés à la survie ou à une forte souffrance : si l’on veut quitter le rapport de force, l'attitude que nous allons adopter, ne peut être dictée par l'urgence - qu'elle soit réelle ou pas. Cela exige d’accepter - à brève échéance - les conséquences néfastes de l’absence de solution, sachant que c’est le prix à payer pour qu'une solution réelle et durable puisse voir le jour. Car sortir de cette situation par la force consiste à tenter de maintenir un couvercle sur un réservoir d’essence exposé à des flammes plutôt que d’arrêter la source des flammes. Et cela d'autant plus, que dans la plupart des cas, l'urgence n'est qu'un leurre.

Car quand nous sommes pris dans un événement qui déclenche des émotions qui vampirisent notre mental, il est impératif d'attendre que l'émotion soit suffisamment apaisée avant de se décider à agir. C'est en général très difficile car c'est l'émotion qui va nous dicter d'agir et nous imposer une impression d'urgence. C'est ici que l'effet de la méditation peut intervenir. Elle peut, par l'état mental et émotionnel plus serein ou plus détaché qu'elle génère, nous transformer mentalement et émotionnellement jusqu'à nous rendre capable de prendre suffisamment de recul pour vivre l'émotion sans pour autant croire les pensées qui vont nous dicter d'agir au plus vite. Car, si nous ne prenons pas la peine de donner notre attention à l'émotion en l'observant, l'acceptant, la traversant, et même en travaillant sur elle ; ce sera alors le petit singe de notre mental qui va prendre la relève automatiquement et nous entraîner vers l'action probablement inappropriée ou, faute de pouvoir agir, vers la rumination. Cette dernière aura pour effet d'un côté, de maintenir, voire de faire augmenter l'émotion, et d'un autre côté, de nous entraîner dans des raisonnements pseudo rationnels (car altérés par la présence de l'émotion) et qui nous amèneront vers des erreurs de jugement, des compréhensions inadaptées de la situation, et donc à poser des actes inappropriés, voire carrément nocifs pour nous-mêmes et pour d'autres.

Le refus d'agir selon l'impression que nous avons d'une urgence ne peut bien évidemment pas s'appliquer à toutes les situations. Car lorsque les conséquences néfastes sont graves et immédiates, il est pratiquement impossible de prendre son mal en patience en disant placidement que l'on ne veut pas agir de manière précipitée. Cependant, même dans ces conditions, il vaut parfois mieux pratiquer l'acceptation et la patience et agir autrement. Car agir dans l'exigence et la violence, bien souvent, ne garantit pas d'obtenir ce que l'on recherche, et peut à l'inverse créer la résistance face à notre réaction et aggraver la situation.

iv Exploiter l’émotion sans agir sous son emprise

 

Si nous parvenons à faire l’apprentissage de postposer nos actions lorsque notre interrupteur émotionnel est activé (la présence d’émotions et de ruminations en sont les indicateurs) ; nous serons mieux en mesure de baser notre action ou réponse dans l’apaisement. Nous parviendrons alors à développer une autre attitude grâce à l’expérience de ces mêmes émotions qu’on aura apaisées. Cela nous donnera la motivation, l’énergie ; nous aidera à clarifier nos besoins et intentions, et dès lors, aussi, à nous connecter à notre intuition et à notre créativité pour élaborer notre réaction à l’événement qui aura déclenché l’interrupteur. Cette réaction sera dès lors sensiblement différente, nettement plus constructive, également plus efficace, et souvent aussi empreinte de sagesse et de bienveillance.

C’est donc un apprentissage extrêmement enrichissant, dont ne peuvent bénéficier les personnes qui agissent sous l’impulsion, ou qui bloquent leurs émotions, ou encore qui cherchent des échappatoires pour ne pas les vivre pleinement. Car c’est là que se démarquent le type de réactions plus constructives de celles qui sont purement rationnelles et dans le déni des émotions. La présence d’émotions ne nuit absolument pas si nous apprenons à les utiliser correctement (non impulsivement). Car ce sont justement elles qui vont pouvoir nous guider, en modelant le raisonnement rationnel pour le rendre mieux adapté à la réalité. Car la réalité implique toujours des aspects émotionnels, psychologiques, relationnels, que la rationalité n’est pas en mesure de gérer à elle seule.

v Une forme de connaissance de soi

 

La connaissance de soi, nécessaire pour éviter les rapports de force, consiste en la capacité de reconnaître, observer, accepter, traverser nos pensées et émotions inadéquates déclenchées dans une situation donnée, sans tomber dans le piège de les croire et d’en faire usage pour agir par rapport à cette situation.

Il s’agit d’avoir la capacité, la lucidité, la clairvoyance. Cela consiste à être conscient quand le verre a été secoué et que la vase est mélangée à l’eau, et à ne pas utiliser la vase pour nourrir nos raisonnements et comportements. C'est l'acceptation de notre part d'ombre. Prendre nos distances par rapport à nos pensées est le résultat d'un apprentissage (voir à ce sujet mon article  [voir Ref J : https://sechangersoi.be/4Articles/Tapenseenestpastoi.htm]).

Et ce n'est pas peu. Cela peut consister en une réelle rééducation. Non seulement en détricotant une grande partie de notre système de croyances, mais surtout en désactivant bon nombres d'automatismes de pensée qui en sont le corollaire. Au-delà, cela nécessite aussi une sorte d'hygiène mentale et psychologique à entretenir.

Et pour les générations futures, ces apprentissages pourraient tout simplement finir par faire partie de l'éducation, qui permettrait alors d'épargner un lourd travail de remise en question à l'âge adulte.

vi Le détachement

 

Le détachement est l’attitude qui découle de cette connaissance de soi. Il consiste à ne pas s’accrocher à nos émotions et pensées qui créent l’urgence, le désir d’exigence, le désir de vengeance ; et qui poussent aux actions intempestives et violentes. C’est la capacité de savoir que la réalité se trouve au-delà de la frontière du verre dans lequel nous nous trouvons (c'est-à-dire la situation qui nous concerne), et que nous ne pouvons voir au-delà quand le mélange est rendu opaque par la vase. Et que poser des actes justes, dans la réalité, ne peut se faire en fonction de la couleur de l’eau lorsqu’il y a tempête dans ce verre d’eau. Cela exige dès lors d’attendre que la vase se dépose, quelles que soient les conséquences dans le verre d’eau. Il s’agit donc de la conscience que ce qui nous préoccupe est imbriqué dans une situation bien plus vaste que celle du verre où nous nous trouvons. C'est la partie la plus difficile, car lorsque nous sommes piégé dans une situation difficile, paniquante ou injuste, qui implique de grosses émotions, celles-ci nous masquent complètement la réalité, et crée une situation que l'on peut comparer à un mirage, dans lequel toute action ne peut être qu'erronée. Le détachement est donc la capacité à se trouver devant un mirage de pensées et d'émotions, avoir présent à l'esprit qu'il s'agit d'un effet psychologique, et ne pas croire notre interprétation du moment de la situation à laquelle nous sommes confronté.

vii La présence de doutes dans la confiance

 

Agir en confiance tout en gardant des doutes est la résultante des points précédents. Tant que nous ne pourrons rejoindre la lucidité qui permet la clairvoyance face aux difficultés que nous rencontrons ; il est essentiel de garder des doutes, tant concernant la perception que nous en avons, que sur la manière dont nous voulons y réagir. Si nous savons que nous sommes dans une tempête dans un verre d'eau - même si celui-ci a la taille du réchauffement climatique, par exemple - il est dangereux de foncer tête baissée pour résoudre ce qui nous préoccupe. Lorsque nos idées de solutions sont inspirées par la vase, par les émotions, par nos exigences, elles ne vont pas perdurer dans le temps. A l'inverse, une vraie solution, adaptée à la réalité, va s’imposer à notre esprit dans le temps. Elle va s’affiner dans sa conception. Et la présence de doutes ne va pas nous en éloigner. Et c’est la persistance dans le temps, du fait que nous la trouvons adéquate et que nous nous donnons du temps pour la peaufiner, qui va permettre, malgré les doutes, à être confiant que cette solution est juste. Et que, même si en apparence, dans un premier temps, elle devait être refusée par ceux à qui nous la proposons, ou même si elle ne porte pas ses fruits ; elle reste juste.

viii Le respect et la bienveillance absolue

 

Si la solution est bonne et qu’elle est adaptée à la réalité, elle sera bonne pour tout le monde. Elle frustrera peut-être ceux qui étaient à la source du problème, mais elle ne sera pas injuste pour eux. C’est cela qui fait que, sur la durée, ils finiront par l’accepter et qu'elle se révélera être durable.

Pour illustrer cela on peut évoquer toutes les problématiques liées au racisme, à la discrimination, au ségrégationnisme, à l’apartheid, à l’esclavage. La résolution de telles problématiques prend des générations de temps, mais ceux qui en étaient à la source, y gagnent eux aussi au change. Ils n’ont peut-être plus de main d’œuvre corvéable à merci, de souffre-douleur sur qui se défouler, ou de bouc émissaire sur qui projeter toutes leurs rancœurs, mais ils bénéficient d’un enrichissement humain et culturel bien plus grand que tout cela.

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Table des matières

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Remarque préliminaire

INTRODUCTION

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PREMIÈRE PARTIE : POSER LE PROBLÈME – QUE SE CACHE-T-IL DERRIÈRE LES MOTS DE L'ARGENT ET DU PROFIT

A) INTRODUCTION

B) RICHESSE ET PAUVRETÉ FONCTIONNENT PAR VASES COMMUNICANTS DE MANIÈRE SYSTÉMIQUE

C) L'ARGENT - LES RÔLES INDIRECTS ET DÉTOURNÉS QUI LUI SONT ATTRIBUÉS

1. Moyen de subsistance, et bien au-delà

2. La reconnaissance et son exploitation commerciale

3. L'argent n’est pas neutre – pouvoir et autres dérives

4. L’argent donne un statut

D) LE CONCEPT DE PROFIT ET LES VALEURS QUE CELA SOUS-TEND

1. Profit équitable ou profit abusif

2. L'indécence des dividendes - quelques données chiffrées

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E) LES CONSÉQUENCES DU PROFIT ET DES RÔLES INDIRECTS DE L'ARGENT

1. Les conséquences matérielles de l'appât du gain

a - les dérives dans l'industrie : quand la fin justifie tous les moyens

b - Répartition inéquitable de l'argent - Les écarts de richesses

2. la classe la plus riche, de loin la plus destructrice

3. A l'autre extrême de l'échelle de la richesse, on meurt par millions, dizaines de millions, centaines de millions

4. C'est la richesse extrême des plus riches qui maintient la mortalité par millions des plus pauvres

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F) LES CONSÉQUENCES DE L’APPÂT DU GAIN SUR LES MENTALITÉS

1. La survie ou l'avidité

2. L’argent corrompt et pervertit

3. La course pour grimper vers plus de richesses

4. La complaisance des consommateurs

5. La violence

G) LES CROYANCES IMPLICITES CONCERNANT L'ARGENT

1. L'argent doit être une ressource limitée

2. Il faut travailler pour gagner sa vie

3. Les gens riches sont plus heureux

4. La richesse se mérite, donc implicitement la pauvreté aussi

5. Il faut travailler dur pour bien gagner sa vie

6. L'argent gonfle tout seul

7. L'augmentation du coût de la vie, l'inflation, la dévaluation de la monnaie

8. Être riche ne nuit à personne

9. En économie, ce qui est légal est moral

10. L'économie c'est une science, complexe - il faut se fier aux experts

11. Ce sont les politiques qui détiennent le pouvoir

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12. La croissance est bonne pour l'économie

a - Effet logarithmique de la croissance

b - Empreinte écologique et jour du dépassement

c - Démographie

H) LES PRINCIPAUX VÉHICULES DE LA CULTURE DU PROFIT

1. La publicité

2. Les médias de l’information

3. Les réseaux sociaux

4. Les médias du divertissement et en particulier, la télévision

5. La domination masculine

6. La culture et l'éducation

I) L'IMPLICITE ET L'EXPLICITE

J) CONCLUSION

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DEUXIÈME PARTIE : PREMIÈRES IDÉES DE SOLUTIONS : Découpler le travail et l’argent – découpler l’argent du profit

A) INTRODUCTION

B) LES ALTERNATIVES QUI RESTENT A LA MARGE

1. Nous ne sommes pas encore prêts

2. Les solutions font encore partie du problème

C) ABANDONNER NOS CROYANCES SUR LA CROISSANCE, ET BOULEVERSER LA LOGIQUE DE L'EMPLOI

D) DÉCOUPLER TRAVAIL ET ARGENT - L'ALLOCATION UNIVERSELLE

1. Moins de travail à pourvoir

2. Créer la motivation à travailler

3. Conception du travail

4. Financement de l'allocation universelle

5. L'allocation universelle donnerait du pouvoir à ceux qui actuellement n'y ont aucunement accès

E) DÉCOUPLER L'ARGENT DE LA RECHERCHE DE PROFIT

1. Créer une économie qui n'est plus régie par l'argent

- Le rôle des initiatives citoyennes

2. Une seule initiative et l'effet boule de neige

3. Construction de la nouvelle tour

4. Quelques exemples de changements concrets à venir dans la société

a - La démocratie participative

b - Le pouvoir politique se transformera et reprendra du pouvoir face au pouvoir économique et financier

c - Bourse fermée

d - Disparition des impôts

e - Les entreprises démocratiques se multiplieront, voire se généraliseront

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F) DIMINUTION DU RÔLE DE L'ARGENT

1. Evolution des mentalités

2. Le vrai rôle que devrait avoir l'argent

a - Réduire l'utilisation et le rôle de l'argent

b - Apprendre à échanger sans compter

c - La diminution de l'importance de l'argent dans nos vies

TROISIÈME PARTIE : LE CONTEXTE DU CHANGEMENT

A) AU NIVEAU POLITIQUE

B) AMENER LE VIRAGE POLITIQUE VIA LES MOUVEMENTS CITOYENS

C) BALANCE A PLATEAU : ALLER VERS L'ALTERNATIVE

D) NOS PETITS PAS INDIVIDUELS SONT CAPABLES DE GÉNÉRER DE GRANDES MARRÉES CITOYENNES

E) PROFILS DE CITOYENS : LES CONDITIONS POUR CHANGER

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QUATRIÈME PARTIE : LE CHANGEMENT DU NIVEAU DE CONSCIENCE

A) INTRODUCTION

B) LA NÉCESSITE DE PERCEVOIR L'IMPORTANCE DE L’ÉVOLUTION INDIVIDUELLE D'UNE PART IMPORTANTE DE LA POPULATION

1. Qui est en premier concerné

a - Les plus riches

b - Les plus pauvres

c - La classe moyenne

2. De quel changement individuel parle-t-on : tout d’abord, dans le concret

a - La responsabilité d’agir même si on est seul à le faire

b - Et si la notion de goutte d'eau dans l'océan s'avérait totalement fausse ?

c - Cesser de leur donner du pouvoir

d - Liberté - autonomie - solidarité

3. Au-delà des modifications de comportements citoyens ou de consommateur : l'élévation du niveau de conscience

a - Conscience et information

b - Conscience et technologies

c - Conscience et solutions nouvelles

d - Dénouer les nœuds qui sont dans nos têtes

e - Changer la couleur de nos lunettes : changer notre mode de pensée

f - Bousculer l'édifice de nos croyances

g - Saut d'évolution de l'humanité

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4. Dépasser les freins au changement :

a - Sous hypnose : nos doutes, notre passivité, notre conformisme, notre lâcheté

b - Syndrome de Stockholm

c - La difficulté d'aller à contre courant – la soumission à l’autorité de Milgram

d - Mettre des mots sur ce qui est implicite afin d’en éviter les incohérences

e - Quitter notre mentalité va nous faire peur

f - Le choix du pessimisme sous prétexte de réalisme

CINQUIÈME PARTIE : LES DEUX PILIERS PRINCIPAUX DU CHANGEMENT : Privilégier les raisons du cœur au raisonnement cartésien et lâcher le rapport de force

A) QUAND NOS SOLUTIONS MAINTIENNENT LE PROBLÈME TOUT EN LE RENDANT MOINS VISIBLE

B) PRIVILÉGIER LES RAISONS DU CŒUR AU RAISONNEMENT CARTÉSIEN

1. Introduction

2. Nous supposons à tort que toutes nos pensées sont rationnelles par essence (excepté dans la folie ou lors de certains dérapages)

3. Prendre notre rationalité pour seule référence , seul repère, comme seule valable, seule efficace, ...

4. Notre recours à la rationalité nous mène souvent en bateau : une atèle sur une jambe de bois

5. Une solution qui ne porte pas - toute rationnelle qu'elle puisse être - n'est pas une solution

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6. Un enseignement qui reflète tout notre système de pensée rationnelle et ses failles, dans un cadre éducatif qui fait souvent défaut

7. La fiabilité relative du raisonnement scientifique de l'expert - un regard sur le réchauffement climatique

8. Notre incapacité à gérer correctement nos découvertes et inventions scientifiques

9. De nouvelles références pour guider nos choix

C) LÂCHER LE RAPPORT DE FORCE

1. Introduction

2. Le rapport de force

a - En quoi consiste le rapport de force ?

b - Lâcher le rapport de force

c - Nous fonctionnons dans le rapport de force comme nous respirons

d - Les enjeux du rapport de force ou de son absence

e - La violence n'est jamais loin du rapport de force, la non-violence non plus

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f - Comment les rapports de force imprègnent toutes nos conceptions

i La mentalité basée sur le rapport de force

ii Notre incapacité à envisager les conflits en dehors du rapport de force

iii Une société de dominants et de dominés : le rapport de force est partout

iv La soumission

v La désignation d'un fautif

vi rapport de force et confiance en soi

vii rapport de force et libre arbitre

g - Comment les rapports de force définissent notre vie sociale et nos dépenses

i Les comportements, références et marqueurs sociaux résultants de la prégnance généralisée des rapports de force

ii Les sphères d’influence sociales, culturelles et commerciales

iii Rapport de force dans le cadre professionnel

iv Rapports de force et monde virtuel – école de narcissisme

v rapport de force et voiture

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vi Rapports de force, consommation, et recherche de profit sont foncièrement et intrinsèquement liés

- les comportements de survie

- les comportements d'avidité

- notre complaisance

- les comportements de compétition

- les comportements d'exigence

- les comportements de défense de nos privilèges

- les rapports de force ne sont jamais loin de nos comportements de matérialisme et de notre cupidité

vii quitter le rapport de force mène à se désintéresser des richesses et de la consommation

h - Rapport de force à l'échelle collective

3. Connaissance de soi : notre part d'ombre

a - Introduction

b - Rapport de force versus empathie - les deux facettes de l'être humain d'aujourd'hui

i Ambivalence des comportements

- l'attitude face aux inconnus

- l'attitude face à l'entourage

- Un interrupteur dans la tête et l'apprentissage de stratégies pour y remédier

ii Le moment de bascule

- Face aux inconnus

- Face à l'entourage

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iii On ne peut désinvestir nos pensées et émotions dites "négatives" uniquement par le simple choix de penser positif

iv découvrir les effets de l'interrupteur

v apprendre à gérer l'interrupteur

vi la gestion de l'interrupteur sur la durée

vii Accepter notre part d'ombre c'est accepter celle des autres

c - Le capitalisme exploite notre part d'ombre

d - La part d'ombre et le rôle des citoyens en transition

e - La part d'ombre et le rôle des crises

f - Facteurs favorisant ou non la propension à utiliser le rapport de force

i Tout d'abord, notre passé forge en grande partie qui l'on est : notre tempérament, nos conditionnements, nos blessures, nos tendances.

ii Ensuite, c'est notre situation du présent qui va aussi déterminer nos réactions face à l'adversité.

iii Niveau de conscience

g - Notre capacité à l'empathie dépend surtout de notre capacité à reconnaître ce qui nous en éloigne - l'altruisme des religions élude cet aspect

h - Evolution personnelle et déni de réalité

i Fuir totalement l'actualité nous fait perdre contact avec la réalité

ii Quand utiliser la loi de l'attraction devient magique

iii Évoluer dans un monde de bisounours

iv Évoluer spirituellement ne peut pas nous épargner d'adapter de manière intègre nos comportements à la réalité très concrète

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4. Quitter le rapport de force - accueillir notre part d'ombre via un réel travail psychologique

a - L'étape incontournable : commencer par reconnaître notre part d’ombre

b - Part d’ombre et rapport de force

c - Parvenir à déjouer l'emprise négative de certaines de nos émotions et de leurs conséquences sur nos pensées et nos comportements

d - Les attitudes mentales à privilégier

i accepter

ii persévérer à demander

iii Faire évoluer les demandes et propositions en traversant les échecs, en apprenant de nos erreurs

iv Accepter dans certains cas la solution de l'autre qui ne nous satisfait pas, mais peut mener vers nos objectifs

e - Se mettre dans la bonne disposition d'esprit

i La détermination

ii L'absence d'exigence

iii L’absence d’urgence

iv Exploiter l’émotion sans agir sous son emprise

v Une forme de connaissance de soi

vi Le détachement

vii La présence de doutes dans la confiance

viii Le respect et la bienveillance absolue

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f - Quand le rapport de force s’éloigne, l’empathie et la solidarité peuvent apparaître

g - Aller vers le cœur

h - Changer

i - Notre part d'ombre est notre alliée

j - La différence entre la compréhension et la conscience

k - Pour prendre de la perspective

SIXIÈME PARTIE : LES FACTEURS D'INFLUENCE DU CHANGEMENT

1. Deux mondes parallèles

2. Conscientiser, chercher à influencer : c'est se tromper

3. La réelle influence s'opère loin des discours

4. Notre rôle de colibri et son effet boule de neige

5. L’influence des médias de l’information

6. Le rôle des crises

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7. L’éducation et l’enseignement – y compris le rôle qu’y joue le web

8. Le pouvoir de la minorité

9. Catalyseurs d’un autre genre

a - L'intelligence collective

b - Les neurones miroir

c - L’épigénétique

d - La contagion de l'altruisme

e - Les champs morphiques (ou morphogénétiques)

f - La transmission de toutes nos pensées et émotions

g - L'auto-contagion

10. Conclusion

VERS UNE UTOPIE NON DÉCONNECTÉE DE LA RÉALITÉ

- La métaphore du flocon

- Un dernier petit coup de pouce

ANNEXE Un détour par la théorie polyvagale

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ICI COMMENCE LE DEUXIÈME VOLET DE CE LIVRE

RÉFÉRENCES

REMERCIEMENTS