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Dans le monde du travail tel que nous le connaissons aujourd'hui, la majorité des emplois ne fonctionnent pas en vertu de la carotte que constitue l’attrait de l’argent, mais bien en fonction du bâton que constitue son manque. En ce sens que, selon leur parcours scolaire et professionnel, la plupart des travailleurs ne choisissent pas véritablement leur emploi, ils prennent ce qu'on accepte de leur donner, sans pouvoir discuter des conditions. Et cela est encore plus vrai pour ceux qui ont des enfants ou autres personnes à charge.
Manquer d’argent consiste, comme nous l'avons vu, à fonctionner en mode survie. Cela génère du stress. Cela impose de vivre dans l'immédiateté sans aucune capacité à planifier. Cela stimule les émotions négatives et les comportements qui en découlent : agressivité et violence, dépression, inhibition. Et cela peut être comparé à une forme de privation de liberté. Tout acte et décision sont forcés d’aller dans la direction de la survie ; et en ce sens, il n’y a pas vraiment de choix possibles. Il y a bien sûr des degrés différents dans ce mode de survie : comme par exemple, chercher à simplement se nourrir, chercher un travail décent, ou encore chercher un logement confortable.
De plus, si dans un premier temps le moteur pour obtenir de l’argent, est de survivre ; l’appât du gain, apparaît très vite ensuite, dès que la survie est assurée et qu'un surplus devient possible. On commence par épargner : la poire pour la soif. Et si la possibilité d'augmenter ses revenus existe, rares sont ceux qui la refusent. Et commencent alors l'accumulation de biens, les dépenses, l'augmentation du confort, qui devient vite du superflu, ensuite du luxe, et dans la foulée, du gaspillage. La limite entre confort et luxe n’est pas toujours claire et beaucoup la franchissent sans s’en rendre compte.
Plusieurs facteurs interviennent pour nous pousser à chercher à nous enrichir toujours plus.
Tout d'abord, lorsque l’on parvient à quitter le mode de survie dans les faits ; au niveau psychologique, on garde souvent les mêmes attitudes, les mêmes comportements, qui vont créer un besoin d’accumuler, de toujours avoir en réserve, et de ne jamais atteindre la satiété. Il s'agit d'un aspect réflexe face aux stress qui est un moyen de calmer nos peurs. Il n'est pas nécessaire d'avoir connu la précarité pour manifester un tel réflexe. La peur de manquer existe chez tout le monde, mais la sécurité d'un revenu peut l'apaiser, et aussi, la conscience de cette peur peut permettre d'apprendre à la gérer en l'absence de menace.
A cette tendance à accumuler, tant l'épargne que les achats, se greffent les conditionnements à la consommation via les influences de notre environnement. La télévision, la publicité, les modes, les réseaux sociaux et autres influences du net, et aussi pour part, la pression de notre entourage, parmi d'autres multiples facteurs, vont guider nos choix, nous modeler, et nous dicter d'acheter et dépenser toujours plus, et donc de nécessiter toujours plus de revenus pour y parvenir. Il est considéré que faire du shopping, acheter, posséder, c'est "se faire du bien". Même les psychologues sont capables de nous entraîner sur cette voie. Or, compenser nos peurs, nos manques, nos frustrations, par des dépenses (achats ou divertissements), ne nous apprend en rien à gérer et traverser ces émotions, et nous empêche même d'en devenir conscients.
S’écarter des grand-routes de consommateurs, de téléspectateurs, de clients de réseaux sociaux, etc. par choix, n'est pas forcément difficile, mais implique en général tout un cheminement pour y arriver, car tout nous pousse à rester dans le cadre, et en premier, le besoin de rester socialement intégré.
Et plus nous sommes ancré dans cette culture, plus nous en devenons dépendant. Le mode de survie se transforme alors en addiction. Une addiction inconsciente, pas forcément puissante, qui ne nous détruit pas, même si elle nous empêche d'évoluer, mais qui indirectement détruit tout autour de nous.
Et enfin, plus nous vivons dans l'opulence, plus la menace pour la vie que représentait le manque d’argent, peut se transformer alors en celle de perdre les privilèges ou le statut que l’on a acquis. Si on ne fait pas un saut d’évolution, on risque même, à la fois, de garder le comportement de survie malgré l’aisance acquise, et celui de l’avidité liée à la peur de perdre les privilèges.
Et si en mode survie, nos comportements peuvent se révéler cruels envers autrui ; en mode privilégié, ils peuvent devenir nettement plus pervers. Car se battre pour des privilèges et devenir avide de toujours gagner plus, nous fait quitter le monde de l’éthique et entrer dans celui où tous les coups sont permis. Ce n’est pas un choix conscient et cela s’installe en général sur des années ou des décennies, voire, sur plusieurs générations.
Sur le long terme, à l’instar du pouvoir, l’argent en excès corrompt et pervertit. Il pourrit nos valeurs et achète notre honnêteté. Plus on est riche ou plus on est payé ; et plus il devient tentant d’accepter de faire une croix sur nos valeurs, d’agir malhonnêtement, de mentir, etc. Et cela en toute bonne conscience, en accommodant la réalité, quitte à se considérer comme référence, comme généreux, bienfaiteur. Et il n'est pas nécessaire de posséder de grands surplus d'argent pour entrer dans ce processus. Dans la classe moyenne, nous en sommes aussi atteints, à petite échelle, mais atteints quand même. Les plus riches sont dès lors une caricature de ce que les gens aisés pratiquent déjà.
Des recherches à ce sujet ont été menées aux États-Unis :
[Source : http://www.slate.fr/lien/50743/riches-comportement-morale-ethique].
L’argent peut tout acheter, absolument tout, même le corps des femmes (et dans une bien moindre mesure, celui des hommes) afin d'assouvir des pulsions. Et l’on peut dès lors s’attendre à ce que, plus les gens possèdent de richesses ou sont richement payés, plus cela les rend capables de s’asseoir sur leurs valeurs, leur honnêteté, leur bienveillance, et donc les rend capable du pire.
Et dans le cadre des entreprises, les dividendes élevés, les salaires explosifs de CEO, les bonus, ne sont en quelques sortes rien d’autre que des formes de pots de vin rendus licites par des règles économiques créées par le cercle de ceux qui en bénéficient. Et c’est donc bien dans ce cadre que l’on finit actuellement par découvrir toutes les dérives qui font de plus en plus surface.
Puisque l’argent corrompt au même titre que le pouvoir et probablement beaucoup plus ; en posséder énormément est donc non seulement injuste puisque cela crée de la pauvreté, mais cela est aussi intrinsèquement nocif et malsain.
C’est un processus inconscient. Il est relativement aisé de l’observer sur les autres, mais nettement plus difficile de le détecter chez soi. Cela exige une réelle intention, un choix, et un travail sur soi. Et le chemin pour y arriver implique de quitter le déni tout en faisant le choix de la sobriété et en faisant profiter notre argent à d’autres.
La problématique ne se limite malheureusement pas aux comportements des plus riches. Car chacun, à son niveau, sur l'échelle sociale, va tenter de se hisser au niveau supérieur, dans l'admiration des péripéties de ceux qui font pire. De la sorte ce sont les plus nantis qui entraînent tous les autres sur leurs pas, en montrant le mauvais exemple, persuadés qu'ils sont d'être des modèles. Ce sont eux qui influencent les comportements à tous les niveaux inférieurs de la pyramide sociale. Mais comment la dérive des uns produit-elle un tel effet boule de neige sur le reste de la population ?
En réalité, chacun à son niveau, tente de se rapprocher le plus près possible de ce mirage de bonheur que représente la richesse. Chaque niveau social est attiré par le niveau qui lui est supérieur. Et à cela s'ajoute la compétition entre pairs pour maintenir son rang, et même faire mieux.
Dès lors, nos dépenses à chacun sont en partie, voire en grande partie, définies par les dépenses que font les gens plus riches que nous, car nous les envions, et voulons leur ressembler, montrer que nous approchons le plus possible leur statut, et comme les plus riches deviennent de plus en plus riches, et que les écarts de richesses grandissent, cela veut dire que cette soif de richesse et de monter en statut est d'autant plus forte et moins que jamais apaisée. Et cela se traduit dans une imitation des comportements des plus riches, et donc, plus on monte dans l'échelle sociale, plus les gaspillages et la surconsommation sont importants.
Dans les sociétés plus égalitaires, l'attrait pour l'opulence est donc moins grand, alors que dans les sociétés plus inégalitaires, la compétition, et donc la consommation qu'elle suscite, se révèlent être bien plus marquée.
Thorstein Veblen (1857-1929), économiste et sociologue américain, décrivait déjà cela dans sa « théorie de la classe des loisirs » (1899), en utilisant le terme de « consommation ostentatoire ». Selon lui, si l’économie sert pour part à répondre aux besoin de la population, elle sert surtout à satisfaire l’insatiabilité de consommer et parader des classes privilégiées.
Source : [https://fr.wikipedia.org/wiki/Thorstein_Veblen]
André Boyer, dans son article : « Le monde selon Veblen: la sur consommation expliquée » (2013), le formule ainsi :
« Veblen reconnaît qu’une partie de la production de biens répond à des besoins réels, mais il constate qu’en pratique le niveau de production nécessaire pour y répondre est rapidement atteint. Au-delà de ce niveau, le surcroît de production est suscité par le désir d’étaler ses richesses afin de se distinguer d’autrui, ce qui constitue une consommation ostentatoire et bien sûr un gaspillage. »
Plus on monte dans l’échelle sociale, et plus ce besoin d’étaler sa richesse et son pouvoir sont importants. Et ce sont les loisirs, la mode, les apparences, les voyages, les extravagances, qui deviennent alors les références pour se comparer à autrui. Dans les pays riches ou émergents, l’économie n’a pratiquement plus pour fonction d’être utile, elle sert principalement les désirs futiles d’une population aisée. Dès lors elle sert le gaspillage, la destruction de l’environnement, et les injustices.
Et ce mode de fonctionnement est en quelque sorte contagieux. Comme la tendance est à imiter ceux qui vivent mieux que nous (ou que nous considérons comme tels), il y a un effet d’entraînement vers les couches moins aisées qui adopteront elles aussi cette consommation ostentatoire, mais à une échelle plus réduite. Et c’est donc la configuration de la société tout entière qui se calque sur ce modèle, et fait exploser notre empreinte écologique.
En ce sens, ce ne sont pas tant nos besoins qui la font exploser, que notre « consommation ostentatoire », enseignée par la publicité, notre culture occidentale, et les classes les plus riches.
Ainsi, plus les écarts de richesse sont importants, plus la course vers l'argent devient intense, et plus il y a de laissés pour compte.
En réalité, nous vivons tous dans un monde dont nous avons tellement bien intégré les vices (de manière inconsciente) ; que non seulement nous les acceptons implicitement, mais parfois nous soutenons directement ceux qui les exploitent, jusqu’à les utiliser nous-mêmes, en toute bonne conscience.
Dès lors, consommer et investir dans des actions n'est pas considéré comme nuisible, et nous nous y adonnons à cœur joie.
De plus, ce qui facilite cette position, c’est qu’il y a toujours un voisin ou l’autre qui fait pareil ou qui profite encore plus que nous du système et de ses dérives. Tout le monde ou presque prêche les bienfaits de la richesse matérielle, car celle-ci est encore toujours considérée comme méritée (dans le monde occidental du moins). Nous préférons amasser, collectionner, gaspiller dans l’insouciance que aller à contre-courant et affronter la désapprobation, en jouant les grains de sable de cette machine si attrayante par ses lumières et ses paillettes, mais tellement destructrice.
Une fois que l’on commence à pouvoir s’offrir du confort, puis dès privilèges, donc dès que l’on possède un peu plus que ce qui nous est nécessaire, on va vouloir posséder encore plus. Et comme on ne peut pas justifier face aux plus pauvres que nous ayons plus ; le fait qu’il y ait des gens qui ont plus que nous rend justifiable à nos yeux, que nous puissions nous-mêmes être plus riche que d’autres. Et donc, plus on s’enrichit, plus on considère la richesse comme acceptable.
Et lorsque nous pestons contre ce qui ne va pas, nous devons bien admettre que nous avons notre propre responsabilité dans ce quelque chose qui ne va pas. (Cf. mon article « C’est notre complaisance envers le système qui lui permet de se perpétuer » -
[voir Ref A :https://sechangersoi.be/4Articles/Complaisance01.htm]).
Il va sans dire qu'à partir du moment où l'on considère que tous les moyens sont bons pour s'enrichir, monter en statut, consommer et profiter ; on ne peut que passer son temps à jouer des coudes. Et si, en dehors de la sphère délinquante et des violences conjugales et familiales, on passe plus rarement aux violences physiques, il n'en est pas moins que le recours aux violence psychologiques est devenu commun, d'autant plus lorsque l'on se retrouve derrière un écran et que les personnes à qui on inflige cette violence ont perdu à nos yeux toute humanité et ne sont plus que le défouloir de nos colères et frustrations ou encore le jouet de notre sadisme.
Selon Christine Calonne, psychologue, citée dans l’article de Céline Biourge : « Violences psychologiques : la difficulté pour les victimes de pervers narcissiques de se faire reconnaître » de la RTBF (2020), les violences psychologiques sont sans doute le résultat :
« ...d’une société de plus en plus matérialiste où finalement on considère l’autre comme un objet de consommation. Et donc, si l’autre est un objet, on perd l’empathie pour l’autre. On perd la capacité à avoir de la compassion, à vouloir même comprendre l’autre. Les relations de pouvoir sont de plus en plus importantes entre les gens, et donc de violence ».
L'argent, le pouvoir qu'il donne, le matérialisme, les rapports de force qu'il engendre, auront tous pour effet de diluer les valeurs et règles de notre éducation, et de nous amener à les contourner, les braver, les ignorer. Lorsque l'égoïsme écrase la conscience, les limites de la perversité s'évaporent. Le degré d'inhumanité dans les relations est de plus en plus palpable dans la société.
La violence se déploie tant dans les relations entre communautés (guerres, terrorisme, nationalismes, racismes, ...) que dans les relations interpersonnelles (agressivité, manipulation, maltraitance, négligence). Plus on est riche, et plus le chacun pour soi et la méfiance s'amplifient, et l'amabilité n'est plus que façade.
La culture dans laquelle nous baignons nous enseigne à considérer autrui en rapport à ses possessions et signes de richesse ou non. Et cette culture nous est transmise par l'éducation, l'enseignement, les mass médias et tout le système culturel, économique, publicitaire, .... Mais cela vient encore mieux s'inscrire dans notre esprit par nos expériences et conditionnements face aux manques et au pouvoir de l'argent. Ce n'est donc pas tant le fait que nos parents, les enseignants ou les mass médias nous inculquent une ligne de conduite bien définie, mais c'est bien plus l'interprétation de tous les exemples, et commentaires en relation avec l'utilisation de l'argent, et le rapport à l'argent, auxquels nous seront confrontés tout au long de notre vie qui vont modeler nos conceptions.
Les croyances concernant l'argent sont partagées par tous et il est rare qu'elles soient remises en question. Les plus riches et plus puissants font en sorte de les maintenir car c'est dans leur intérêt d'une part ; et d’autre part, parce que comme tout le monde, ils y croient, d’autant plus, que bien souvent ils ont été éduqués dans un milieu où l'on jongle avec ces valeurs comme si elles étaient inscrites dans le béton. Ils ne peuvent dès lors que dénier la logique de la réalité, incapables, en quelque sorte d'y accéder. Et même les gens les plus honnêtes participent donc à ce système et le perpétuent en toute bonne foi, par ignorance, par soumission, par conditionnement, et/ou par complaisance.
« Des fois, je m’imagine que des extraterrestres débarquent sur la Terre et se tapent une grosse barre de rire en voyant les humains fabriquer des lois qui visent à priver leurs semblables de simples jetons – des jetons symboliques d’un concept de leur propre invention, l’argent, et qui donc, par définition, existent en abondance. »
extrait du témoignage de Leslie dans le livre « Bullshit jobs », déjà cité, de David Graeber (2018), Ed.Les liens qui libèrent
[voir Ref 4 : http://editionslesliensquiliberent.fr/livre-Bullshit_Jobs-546-1-1-0-1.html].
« L’argent ne manque pas. Ce mensonge a volé en éclats lorsque les gouvernements ont débloqué 16 000 milliards de dollars pour faire face à la pandémie. »
Gabriela Bucher, directrice générale d’Oxfam International - dans le document déjà cité :
L'argent n'est après tout qu'une création humaine. Sa limitation génère et fait perdurer les inégalités de droit et de vie en rendant son accès en suffisance impossible pour une frange importante de la population mondiale, en transformant de la sorte en privilège le droit à une vie digne.
La création de l'argent n'est pas en rapport avec la création des richesses (production de biens et de service). Par contre l'argent créé se dirige inéluctablement vers ceux qui créent, gèrent, possèdent ou produisent ces biens et services. Un peu à l'image des colons qui se sont appropriés des terres, en chassant, tuant ou prenant en esclavage les autochtones, et qui peuvent ensuite s'enrichir en faisant fructifier ces terres par d'autres ou en les revendant. Nos mentalités sont encore et toujours calquées sur ce modèle, même si des lois interdisent l'esclavage ou si toutes les terres ont à présent déjà un propriétaire. Les start-up, les délocalisations, par exemple, fonctionnent sur le même modèle. On crée un besoin de toute pièce dans le premier cas, et on se sert de petites mains corvéables à merci sans avoir trop de comptes à rendre à qui que ce soit, dans le second cas.
Ceux qui créent l'argent (les banques) sont ceux dont la mentalité est liée au pouvoir de l'argent et à l'avidité de richesse, ou qui dépendent de ces personnes ; alors que ceux qui ont besoin d'argent sont totalement soumis au diktat des premiers. Cela explique que les inégalités grandissent et que les premiers s'assoient sur les besoins et droits des seconds au point d'en laisser mourir dans la misère quelques millions d'entre eux chaque année, et en laissant les autres lutter, souffrir dans la totale impuissance de changer leurs conditions de vie. Et entre les deux naviguent ceux qui ont quitté cette lutte, et vivent dans des conditions décentes tout en prêtant main forte aux premiers pour maintenir ce statu quo. Cela paraît caricatural, et pourtant ce ne l'est pas. J'ai la croyance de penser que personne (ou presque) n'agit dans le but de faire perdurer ce schéma. Cependant, les personnes les plus riches pensent réellement mériter leur place et se croient supérieures aux autres, au point de ne pas concevoir de partager leurs avoirs et de persister à chercher à s'enrichir toujours davantage. Sous des dehors très civilisés (intelligence, savoir, expérience, compétence, culture, éducation, standing), leurs croyances les embrigadent dans des schémas mentaux et comportementaux plutôt archaïques, qui forcent la société à fonctionner sur leur modèle ; l'empêchant d'évoluer.
D'autre part, notre société persiste à considérer que pour avoir droit à un revenu, il faut travailler, excepté lorsqu'on est enfant, gravement handicapé, malade, ou âgé. Lorsqu'on ne fait partie d'aucune de ces quatre catégories, les gouvernants mettent le plus possible d'obstacles pour ceux qui n'ont pas accès à un travail et consacrent énormément d'argent pour toute une administration qui consiste à créer les obstacles, à contrôler que ces obstacles soient bien franchis, et à payer des fonctionnaires pour effectuer "ce travail". Pourtant tout le monde sait qu'il n'y a pas de travail pour tous (selon notre culture, car si l'on se donnait la peine d'arrêter le travail inutile et de faire le travail nécessaire, en le partageant, chacun trouverait sa place). Et dans les pays occidentaux, si l'on cessait de tergiverser pour donner un revenu à ceux qui n'en ont pas, les pertes que représenteraient les fraudeurs, seraient négligeables en comparaison à la machine administrative qui consiste à tenter de contrôler chaque demandeur en le soupçonnant de fraude ; ce qu'exprime parfaitement David Graeber dans son livre « Bullshit Jobs », (2018), Ed. Les liens qui libèrent :
« Des milliers de personnes travaillent ainsi dans de beaux bureaux climatisés et reçoivent de confortables salaires pour s’assurer que les pauvres continuent de vivre dans la honte. »
[voir Ref 4 : http://editionslesliensquiliberent.fr/livre-Bullshit_Jobs-546-1-1-0-1.html]
Et si cela devait changer :
« Et la petite poignée de vrais parasites qui subsistera ne représentera pas un fardeau si terrible, puisque la quantité de travail à abattre pour assurer le confort et la sécurité de la population n’est finalement pas si considérable. Les workaholics compulsifs, qui ne peuvent s’empêcher de faire plus que le nécessaire, compenseront largement l’inactivité de ces quelques feignasses. »
« L'argent ne fait pas le bonheur des pauvres » Coluche
Nous connaissons tous l'adage « L'argent ne fait pas le bonheur ». Et pourtant personne n'applique réellement cette maxime, excepté les religieuses et religieux, ayant fait vœu de pauvreté. Car même si nous y croyons en fonction d'un certain idéal, nos actions n'en tiennent absolument pas compte.
Pourtant, si son absence quasi totale éloigne l'accessibilité au bonheur, l'adage dit vrai. La richesse peut même contribuer à notre malheur quand son influence devient importante dans notre vie.
Tout d'abord, l’argent permet souvent de se procurer des plaisirs, mais le plaisir n’est en rien un gage de bonheur. Le bonheur consiste bien plus en la capacité à donner du sens à ce que nous vivons, et en la capacité à accepter et traverser l’adversité ; qu’en celle de s’octroyer des plaisirs matériels. De plus, la facilité que représente l'argent quand on en dispose nous a appris à ne plus être capables de nous faire plaisir sans rien acheter. L'argent nous apprend à nous comporter comme ces rats de laboratoires qui sont conditionnés à pousser sur un bouton pour obtenir leur nourriture favorite et perdent la capacité de se procurer leur nourriture naturellement.
L'argent permet aussi de se procurer le confort. Mais derrière ce confort apparent se cache surtout le plaisir de l'acquisition d'un côté, mais aussi la recherche de facilité. Confort et facilité ne sont pas synonymes. Le premier permet d'éviter les fatigues inutiles et les douleurs, la seconde nous épargne l'effort et la difficulté et nous enseigne la paresse et la passivité. Et, à trop vouloir lisser les aspérités de la vie, nous en excluons les joies et le sens, sans pouvoir forcément nous dispenser des revers. Et ainsi nous créons l'ennui, la lassitude, le découragement, doublé d'une soif insatiable de divertissement en s'éclatant, se défoulant, se lâchant, se droguant. Et à force d'avoir tout à portée de main, nous perdons nos capacités créatives, mnésiques, notre flexibilité, voire même certaines formes d'habileté tant intellectuelles que physiques et sociales. Nous nous déconnectons de notre réalité terrestre, de nos véritables besoins, de notre environnement naturel.
Le sens de nos vies est inversement proportionnel à l'importance que nous donnons aux richesses matérielles et aux signes de richesse.
Or, remettre la logique, ou plutôt du sens, dans notre conception des richesses n’est pas si douloureux qu’on se l’imagine ; c’est même tout le contraire. Cela permet de réorienter nos objectifs de manière plus juste.
En dehors de la recherche du plaisir, il y a aussi celle de maintenir les privilèges. En effet, si vivre dans la pauvreté et la misère est un combat pour la survie ; posséder de l’argent donne accès à des privilèges. Mais lorsque l’on bénéficie de privilèges, on est presque toujours intrinsèquement menacé de les perdre. Et ainsi plus on a de privilèges, plus on est amené à les défendre. S’enrichir amène donc à toujours sentir la menace de perdre les privilèges (le fameux repli sur soi), tout comme être pauvre implique de toujours être sous la menace de ne pas pouvoir satisfaire les besoins de première nécessité. Cependant la taille de ces menaces n'est pas comparable.
Pour être heureux il est donc nécessaire d’avoir accès à un minimum de confort, et aussi de devenir capable de laisser les privilèges. Cela exige de devenir conscient de tous ces aspects et de les assimiler pour les mettre en pratique. Il ne s’agit pas d’une compréhension intellectuelle à opérer mais bien plus d’une compréhension psychologique.
D'autre part, les possessions ou signes de richesse que nous amassons ne démontrent en rien notre propre valeur, ni même notre niveau de bonheur. La compétition pour acquérir et maintenir un statut, pour briller socialement, constitue un mirage et nous rend aveugle aux valeurs de cœur en nous maintenant dans des comportements et des préoccupations puérils. Lâcher prise par rapport à tout ce que nous croyions nous définir permet de retrouver bien plus de confort psychologique.
Et enfin, la richesse matérielle et la recherche de possessions, comme toute autre recherche de plaisir, est addictive ; ce qui est aussi inversement proportionnel à la capacité d’atteindre le bonheur / d’être heureux. Ce sujet a été abordé par les médias à propos des recherches de l'endocrinologue américain Robert Lustig à ce sujet -
Voici une vidéo courte et percutante sur le sujet publiée par Brut, ayant pour titre « Plaisirs ≠ bonheur : la théorie scientifique sur le bonheur de Robert Lustig » :
[voir Ref 6 : https://www.youtube.com/watch?v=yvur3fyOP6I].
Pour Robert Lustig :
« La quête des plaisirs entrave la quête du bonheur ».
Le mérite est très souvent évoqué lorsque l'on s'enrichit. Soit parce que l'on lie l'enrichissement à un labeur, à un talent, une compétence, des exploits. Soit parce qu'on lie cela à une forme d'hérédité. Soit encore pour faire taire toute revendication de ceux qui seraient moins nantis.
Pourtant, la richesse ne se mérite pas, jamais. Ce n’est pas une question de religion ou de morale, c’est une question de logique.
Être riche c’est s’accaparer les biens d’autrui. Cela fonctionne comme des vases communicants, mais n'est seulement perceptible qu'à grande échelle. Cela est nettement moins visible à l’échelle individuelle, et quand ça l’est, il existe alors en général des garde-fous comme les lois, contrats, frontières, etc. Donc quand nous accumulons de la richesse sans la repartager, à quelque échelle que ce soit, et même si nous ne le percevons pas de manière évidente ; nous sommes en train de piller d'autres populations entières, la nature, et les générations futures.
Si la richesse devait se mériter, cela impliquerait que la pauvreté, la misère et la famine se mériteraient elles aussi. Allez dire cela aux populations entières décimées par des famines, exploitées par des multinationales véreuses, victimes de catastrophes, ou encore piégées dans des conflits armés.
D’une certaine manière, nous savons tous cela très bien. Mais nous préférons le dénier dès que nous sommes bénéficiaires du moindre privilège.
Pour rappel, voici un petit film très didactique de Denis van Waerebeke écrit avec Sabrina Massen qui permet de ne plus en douter. S’il simplifie assez fort la situation, il en démontre tout de même énormément d’aspects et propose une bonne grille de compréhension : « Comment nourrir le monde » (2013 - 9’03’’) :
[voir Ref 2 : https://www.youtube.com/watch?time_continue=537&v=gBsBxpaG7b8].
« Ce que reflète le revenu d’une personne donnée, c’est sa capacité à s’emparer d’une part plus ou moins grande de ce qui est produit collectivement. Même la difficulté concrète d’un travail a peu de chose à voir avec sa rémunération. »
Richard Wilkinson, Kate Pickett, « Pour vivre heureux, vivons égaux ! », (2019), Ed. Les liens qui libèrent
[voir Ref 10 : http://www.editionslesliensquiliberent.fr/livre-Pour_vivre_heureux,_vivons_%C3%A9gaux_!-556-1-1-0-1.html]
Il n'y a absolument aucune corrélation entre le montant des revenus et la pénibilité ou l'exigence que représente un travail. Les emplois les mieux rémunérés ne sont pour la plupart, et de loin, pas les plus pénibles. Ce sont les emplois les moins bien payés qui le sont presque systématiquement. Et si des gens acceptent de les garder, c’est parce qu’ils savent qu’il n’y a pas d’alternative pour eux ; que sans cet emploi ils n’auront plus de quoi vivre. C’est donc bien plus, en fonction d’une menace implicite que la majorité des gens travaillent. Car ils n’ont pas la formation, les compétences, l’expérience, ou les capacités d’effectuer un autre emploi dans les circonstances qui sont les leurs. Ou ils ignorent qu’ils les ont, ou qu’ils pourraient les acquérir. Ou leur situation même de survie les empêche d’avoir le temps et les moyens de les acquérir, et souvent il s’agit bien sûr d’un cercle vicieux, plutôt que de malchance et d’ignorance. On ne naît pas tous égaux face aux chances de nous former, et d'obtenir un emploi. Ce ne sont pas tant nos talents ou nos efforts qui sont déterminants, que notre environnement, notre éducation, notre culture.
Parmi les règles sociales implicites de la société occidentale, beaucoup sont immorales, et tant qu'elles restent dans le non-dit, cela nous arrange bien.
Et les emplois les mieux rémunérés quant à eux, ne sont pas forcément porteurs d'une responsabilité tellement plus grande, et quand ils le sont, ceux qui les occupent ne font pas forcément preuve de comportements très responsables, vu le nombre de ceux qui quittent ces emplois en laissant dans l'embarras l'entreprise tout en bénéficiant de pactoles qu'il est impensable de pouvoir évaluer comme équitables vu leur taille et le total non mérite que cela représente. De plus leur responsabilité est diluée du fait qu'ils peuvent déléguer la presque totalité de leur travail.
L’article de la RTBF « Coronavirus: pourquoi les "métiers féminins", si essentiels dans la lutte contre le Covid-19 sont-ils sous-valorisés ? », (2020), de Sarah Heinderyckx, cite Florence Degavre :
« L’irruption du Covid-19 dans nos vies a le mérite de rappeler qu’aucun lien n’existe entre l’utilité sociale d’une profession et son niveau de salaire et de reconnaissance sociale ».
Cette professeure de socio-économie et études de genre à l’UCLouvain évoque là les métiers de soins, mais son analyse vaut aussi pour d’autres métiers dits "féminins".
Pour mieux comprendre la valeur d'un travail et la rémunération, rien ne vaut la lecture du livre passionnant (déjà cité) « Bullshit jobs » (qu’on peut traduire en français : « jobs à la con »), Ed. Les liens qui libèrent (2018), de David Graeber, anthropologue. L'auteur apporte un éclairage totalement inédit sur la part croissante et phénoménale du travail inutile effectué dans notre société, et sur toute une classe sociale, diplômée en général, plutôt bien payée, et qui effectue des montagnes de travaux inutiles, ou supervise le travail d'autres personnes qui travailleraient tout aussi bien, voire souvent mieux, sans supervision :
« ... plus un travail est bénéfique à la société, moins la rémunération associée a de chances d’être élevée. »
[voir Ref 4 : http://editionslesliensquiliberent.fr/livre-Bullshit_Jobs-546-1-1-0-1.html]
Personne ne l'exprime en ces termes, mais c'est cependant la logique du processus. Nous sommes tous capables d'effectuer des raisonnements logiques et cohérents. Pourtant, lorsqu'il s'agit d'économie nous obéissons tous à un principe tacite, selon lequel l'argent gonfle tout seul, et que cela est inéluctable. Ce principe est même labile. Historiquement les profits étaient nettement plus modérés, et les monnaies étaient relativement stables. Mais depuis quelques dizaines d'années, le phénomène s'est emballé. Et cela n'est en rien dû à un phénomène naturel, mais bien à la volonté de ceux que cela privilégie et qui ont le pouvoir d'en décider. Preuve en est que, encore récemment, l'épargne étaient à un taux plancher (en 2019-2020), et que les états pouvaient même emprunter à taux négatifs, alors que les indices boursiers malgré quelques soubresauts, permettaient de continuer à s'enrichir avec des dividendes dépassant parfois les 40%. Ce paradoxe met lui aussi en lumière l'inégalité de chances de s'enrichir selon que l'on puisse se permettre d'être actionnaire ou que l'on ne puisse que se rabattre sur l'épargne.
Dans une économie saine, les échanges ne devraient jamais permettre de faire fluctuer la valeur des biens, y compris celle de l'argent. Si les actionnaires bénéficient d'une augmentation de 20% voire de 40% de la valeur de leurs actions en un an, c'est forcément que quelqu'un d'autre dépendant du fonctionnement de l'entreprise en aura payé le prix : le fournisseur de matières premières, le sous-traitant et ses travailleurs, la qualité du produit proposé et donc le client qui l'achète, le revenu des travailleurs ou leur conditions de travail, la maintenance et l'administration de l'entreprise, les impôts, l'environnement, et bien souvent, tout cela à la fois avec des effets d'engrenage pouvant toucher des populations entières.
Nous sommes tous coutumiers du fait que la valeur des choses, en argent, ne cesse d'augmenter, et qu'à l'inverse l'argent, avec le temps, perd de sa valeur. Mais il faut savoir que jusqu’au début du siècle dernier, la valeur de l’argent dans toutes les monnaies, restait relativement stable, et qu'ensuite, boosté par l’apparition de la bourse, le système s’est emballé – cf. le livre de Thomas Piketty : « Le capital au XXIè siècle », Ed. du Seuil (2013) - [Source : https://www.seuil.com/ouvrage/le-capital-au-xxie-siecle-thomas-piketty/9782021082289] - et que cela n’a cessé d’empirer en fonction de toutes les décisions prises par la suite, qui ont facilité l’enrichissement des actionnaires, l’anonymisation du capital, et la spéculation.
Dès lors, si le prix de votre pain double tous les 15-20 ans, ce n’est ni dû au hasard, ni à une loi mathématique ou à une loi de la nature, mais par les choix de ceux qui ont établi et fait évoluer les règles économiques. Ce n’est donc en rien inéluctable.
Et la variabilité des prix étant différente selon les produits vendus, ou entre les salaires ou autres revenus ; cette variabilité aide à ce que le citoyen lambda ne puisse saisir l’incohérence de ces évolutions.
Pour mieux comprendre les dérives, qui sont à la base de notre économie, je vous propose de visionner la vidéo : « L’argent dette » de Paul Grignon, (2008) :
[voir Ref 21 : https://www.youtube.com/watch?v=-QK33eDeCew].
Cette vidéo parle principalement de la création de l’argent et révèle pas mal d’incohérences au niveau de sa gestion par les banques et les états. Malheureusement, les débuts de solutions, juste mentionnés, semblent être basés sur le même type de raisonnement que celui qui a créé la situation actuelle.
Cependant la vidéo rend bien la notion de l’absurdité de tout le système. Chaque règle absurde a, dans le passé, mené à de nouveaux obstacles, qui ont été palliés par des règles encore plus absurdes. Et cela reste d’actualité, par exemple quand on regarde comment on a créé la crise énergétique de 2022 en fixant le prix de l’énergie de manière absurde, et comment on tente de la résoudre.
Et les aspects conspirationnistes évoqués brièvement dans la vidéo, ne me paraissent pas vraiment justifiés. Même s’il ne faut pas minimiser non plus, que dans ces sphères de pouvoir, il y a connivence et parfois accords secrets et/ou implicites pour orienter les régulations dans des directions qu’ils ont choisies. Mais je ne pense pas que cela se passe réellement de manière organisée. Dans ces milieux, il ne faut pas oublier que chacun tire les ficelles pour ses propres intérêts, et que mettre en place une organisation pour l’intérêt de tous ceux qui en seraient membres, suffisamment bien réalisée pour pouvoir rester secrète et agir au niveau mondial, n’est probablement pas à leur portée psychologique. Car selon moi, s’ils sont capables de certaines ententes pour aller vers des objectifs définis qu’ils ont en commun, ils ne sont absolument pas capables de solidarité pour généraliser cela à grande échelle par de la réelle collaboration, tout en parvenant à maintenir tout cela secret. On l’a vu pour la création de vaccins contre le covid. Des centaines d’initiatives ont émergé, et ce sont ceux qui avaient le plus d’argent, de pouvoir, d’influence dans les places les plus en vue avec des lobbies les plus efficaces, et sans doute avec le moins d’honnêteté et pas mal de doses de manipulation, qui se sont partagés les plus gros morceaux du gâteau. Mais rien ne pouvait être écrit d’avance comme le prétendaient certaines théories conspirationnistes qui a posteriori ne tenaient pas la route dans ce schéma.
Voir aussi une autre belle illustration, plus courte et plus symbolique, mais très efficace : « La crise des ânes » -
[voir Ref 20 : https://lesmoutonsenrages.fr/2011/09/01/la-crise-des-anes].
Une sorte de métaphore de notre système économique, politique et financier. Toujours et plus que jamais d’actualité.
La majorité des gens acquiesceraient à l’idée que : être riche ne nuit à personne, et une part d’entre eux pensent aussi que si l'on est pauvre c'est parce que l'on est paresseux, parce que l'on n'est pas doué, ou alors c'est la faute à "pas de chance".
Cependant, si s’enrichir est tout à fait légal, ce n’est certainement pas moral. Et les faits devant nos yeux sont de plus en plus probants pour nous le faire comprendre. Toute création d’enrichissement matériel consiste en une création de pauvreté et/ou une destruction de l’environnement.
Car l’argent qui gonfle tout seul sous forme d’actions, est toujours lié, directement ou non : à de l’exploitation, de l’injustice, de l’appauvrissement, ailleurs, ou à un niveau environnemental : à du gaspillage, à de la pollution et à de la destruction.
Dans l’économie mondiale, tout est interdépendant.
Voici un aperçu, à titre d'exemple, de certains dégâts causés par ce système dont nous bénéficions, qui nous ont été révélés par les médias ces dernières années :
Si le système bancaire – boursier - économique, actuel est psychologiquement d’une finesse incroyable dans sa manière de manipuler les masses et d’exploiter nos pulsions les plus primaires ; il est rationnellement totalement incohérent et moralement indéfendable au vu de ses conséquences sur l’humain et sur l'environnement, et par conséquent sur la capacité de survie sur la planète.
Un exemple moins direct et à moindre échelle de l’enrichissement des uns au détriment des autres, mais qui est très représentatif, voire caricatural des conséquences d’une certaine logique commerciale et de la morale qui la sous-tend, est l'existence des loteries et casinos. Il ne s'agit plus de commerce de l'argent à proprement parler, mais bien carrément de jeux autour de l'argent. Des jeux que les lois encadrent. La perte étant la règle, et le gain l'exception ; le législateur en tentant de définir les pertes maximales possibles, légalise de la sorte le principe même du jeu. Et il se remplit les poches ensuite via l'imposition sur les bénéfices. Or les statistiques concernant le nombre de joueurs interdits de jeux pour raisons d'endettement ou d'addiction est très important. Et certaines de ces personnes doivent être prises en charge par des associations, des services psychologiques dans les hôpitaux, voire aussi être suivis par un médiateur de dettes. Ce nombre – pour la Belgique - varie selon les années, entre 120.000 et 280.000 (sur une population d'un peu plus de 11 millions d'habitants) selon les rapports de la Commission des jeux de hasard de Belgique des dernières années - 2016 et 2022 :
[Source : https://gamingcommission.be/sites/default/files/2021-12/2016%20rapport%20annuel.pdf],
[Source : https://www.gamingcommission.be/sites/default/files/2022-05/CJH_Rapport%20Annuel%202021.pdf].
La législation protège donc le commerce de l'argent par les jeux, au prix de la santé mentale et financière d'un pourcentage loin d'être négligeable, de la population (plus d'1% pour la Belgique par exemple), et des conséquences que cela a sur leur entourage.
Comme tous les ingrédients du système économique et financier dans lequel nous baignons, sont interdépendants ; cela implique que le fait d’en bénéficier constitue une participation active à ce système - que ce soit en nous enrichissant ou en parvenant à consommer à moindre coût.
Il y a toutefois trois différences entre les très riches et la classe moyenne : c’est le degré de participation, le pouvoir que cela peut conférer, et ensuite la détérioration des valeurs morales que cela va entraîner. Mais la nocivité du principe vaut pour tous.
Et bien que la richesse ne soit presque nulle part explicitement condamnée, nous savons tous à quel point elle est immorale. Un autre exemple qui permet de le constater est le jeu du Monopoly. Il illustre parfaitement l’intégration dans notre culture des valeurs implicites liées à l’argent.
Dans les règles du jeu Monopoly, vous pouvez acheter un hôtel à disons, 5.000 unités monétaires, dans la rue principale de la capitale ; pour le revendre ensuite 25.000 unités monétaires à un autre joueur. Vous ne manquerez certainement pas, dans l’esprit de compétition lié au jeu, d’éprouver un réel plaisir de vous être enrichi et de l'avoir floué. Mais vous avez de ce fait aussi la notion de la qualité immorale du geste, surtout si vous gagnez la partie lorsque vous aurez mis tout le monde en banqueroute.
Or, les règles du Monopoly ne sont ni plus ni moins que celles de notre économie réelle, en simplifié. Celle-ci étant devenue totalement caricaturale du jeu qui s'en était inspiré, vu l'échelle à laquelle cela se joue.
Piquer dans la caisse est interdit, mais spolier des populations entières reste, malgré tout, tout à fait légal, et bien souvent toléré.
Nous n'en sommes plus au colonialisme légalement accepté, excepté dans certaines parties du monde. Mais la mentalité est cependant restée assez proche. Via le néocolonialisme certains continuent à aller se servir dans d'autres pays, en exploitant les populations locales, leur volant leurs propres ressources pour les exporter vers le nord, et en organisant parfois au passage des guerres, en faisant travailler les enfants, en polluant, ou en leur envoyant des cargos entiers de tous nos déchets, etc. Et tout cela avec l'aval des autorités des pays destinataires et la complaisance des autorités locales. A cela s'ajoutent les délocalisations généralisées, ou encore les firmes qui n'ont aucun scrupule quant aux nuisances graves de ce qu'elles produisent, soit sur leurs propres travailleurs, soit sur l'environnement, soit encore sur leurs clients.
Or, jusqu’à aujourd’hui, ceux qui sont à l’origine de toutes ces dérives, sont les mêmes que l’on rencontre dans les think tank, qui ont les faveurs des banques, obtiennent des réductions d'impôts, jouent aussi avec les paradis fiscaux, sont parfois même intégrés dans le paysage politique, et gardent une aura remarquable dans le monde des médias. Et quand bien même les mass médias finissent par dénoncer une part des injustices dont ils sont responsables, cela ne provoque en général même pas une baisse dans les ventes, ou des problèmes en justice qui les menacent directement, sauf exception.
Certains parmi les plus gros milliardaires parviennent, par exemple, à éluder l'impôt en invoquant tout simplement des pertes en investissements :
Et dans ce contexte, les mécanismes de la macroéconomie stimulent la déresponsabilisation. La responsabilité étant partagée à tous les niveaux de la hiérarchie dans les multinationales, et par des intermédiaires, des succursales, des sous-traitants, et cela dans différents pays ; chacun, à son niveau, se permet de faire quelques entorses à la morale, et la combinaison de toutes celles-ci produit bien souvent des monstres que personne ne peut arrêter.
De plus, plus les entreprises sont importantes, plus ceux qui y sont à la tête sont en mesure de se dédouaner de leurs responsabilités. Et cela, tant par rapport à leurs travailleurs, par rapport à l'environnement, par rapport à la qualité de ce qu'elles produisent, par rapport aux nuisances provoquées par leur production (sur leurs clients), que par rapport aux autorités des pays dans lesquels elles fonctionnent. Ils sont presque totalement libres d'agir à leur guise. Et les gouvernements sont prêts à leur faire des courbettes dans l'espoir de créer de l'emploi sur leur territoire, ou de maintenir ce même emploi. Le client n'y voit en général que du feu. Tant qu'il peut profiter de ce qu'il achète à bon prix, il ferme les yeux. Et même dans certains cas, s'il est informé de l'accumulation de dérives, il continue à acheter, tant que ce n'est pas sa santé, son porte-feuille ou sa survie qui est en jeu. Les GAFAM en sont un des exemples les plus criants. Leurs dérives multiples sont étalées dans l'actualité presque au quotidien, et pourtant rares sont les gens qui cherchent à s'en éloigner.
Chaque fois que je lis un article ou un livre, dont un des sujets traite du système économique actuel, ou de la finance, j'ai l'impression d'être stupide, de ne rien comprendre, d'avoir perdu la mémoire. Je ressens comme un malaise, et à cela se mêle de l'indignation. Mais cette indignation est trop mêlée de doutes. Puisque je ne comprends rien, elle doit sûrement être injustifiée.
Et en même temps, je sais que je ne suis pas stupide. Je sais aussi que, quand je suis manipulée, je ressens le même malaise mêlé à de l'indignation.
Et puis je sais aussi que des économistes - même si encore minoritaires - dénoncent les absurdités de notre système économique et financier actuel. Et les articles et livres sont de plus en plus nombreux à dénoncer et expliquer tous ces dysfonctionnements.
Pourtant, l'information mainstream, celle la plus courante, véhiculée par la plupart des mass médias, des économistes, des politiciens, ne cesse de nous donner des occasions de comprendre que 'l'économie c'est compliqué' ; tout en véhiculant aussi l'idée que tout cela est tellement compliqué et imprévisible que cela justifie toutes les déroutes, pertes, faillites, injustices, qui ne seraient après tout que des effets secondaires, des dommages collatéraux. Et que, dès lors, c’est aux experts qu’il faut laisser la responsabilité de gérer tout cela.
Et cela fonctionne parfaitement. Le quidam n'y comprend rien, on lui dit que c'est compliqué mais que c'est logique, et même scientifique, et il accepte, se soumet aux règles, même lorsque celles-ci lui sont totalement préjudiciables.
Or, si une partie des règles utilisées dans notre économie sont bel et bien logiques, la majorité d'entre elles sont totalement absurdes. Et c'est bien la présence d'une part de logique qui rend difficile de dénoncer l'absurdité et surtout l'injustice de la totalité du système.
Car ce n’est pas parce que nous sommes plus de 8 milliards, et qu’il existe des millions de ressources différentes à gérer, et que mettre en place et faire fonctionner tout cela peut devenir très complexe ; qu’il faut croire que les équations de base sont complexes. C’est en fait parce tous ces processus ne fonctionnent pas réellement publiquement et qu'il existe des vides juridiques dans bon nombre de situations, que tous les abus sont possibles et que ceux qui tirent les ficelles cherchent à nous faire croire qu’une économie saine n’est pas possible.
Pour mieux comprendre les principes de base sur lesquels fonctionne notre système économique, je suggère deux références : tout d'abord la lecture de la fable de « L’île des naufragés », de Louis Even (1936):
[voir Ref 19 : https://bioeconomie.pagesperso-orange.fr/ile-des-naufrages-louis-evens.htm],
et ensuite : la vidéo : « L’argent dette », déjà citée :
[voir Ref 21 : https://www.youtube.com/watch?v=-QK33eDeCew].
Et si vous ne voulez pas vous contentez de ces simplifications, je vous suggère l'interview (1h30) par Thinkerview en 2019, de Gaël Giraud, prêtre jésuite, ancien financier, et actuellement (entre autres) : économiste, auteur et directeur de recherche au CNRS. Il a aussi été, parmi d’autres fonctions, directeur en chef de l'Agence Française de Développement (banque publique à but non lucratif qui finance des projets de développement dans les pays du sud). Dans l’interview, il explique de manière très résumée et volubile, une montagne de notions économiques et financières qui permettent d'avoir un aperçu de la totale absurdité du monde économique et financier actuel, et de la totale impuissance du monde politique pris en otage, même si ce n'est pas du tout en ces termes qu'il l'exprime :
[voir Ref 30 : https://www.youtube.com/watch?v=2oFARgqG0NA].
Notre système économique est tout sauf naturel. Il a été construit de manière anarchique. Sa complexité, qui le rend opaque pour les non initiés, n'est ni vraiment intentionnelle, ni vraiment due au hasard.
Ses règles sont tout sauf réellement cohérentes c’est-à-dire, sauf réellement adaptées à la réalité, humaine et environnementale.
Elles se sont accumulées au fil des années, décennies, siècles, faites de bric et de broc par les uns et les autres, avec dans la plupart des cas, des intérêts personnels pour ceux qui les élaboraient ou pour la classe qu'ils représentaient. Les intérêts parfois conflictuels ont amené à aménager toujours plus de sous-règles, permettant d'éluder des pertes financières à ceux qui les initiaient. Et cela a rarement été réalisé dans le sens du bien commun, même lorsque les intentions officielles étaient déclarées comme telles. Les citoyens, électeurs, travailleurs, et même épargnants, ont toujours été écartés de ces décisions. Même les élus étaient parfois écartés des décisions ; devant pourtant, a posteriori, consacrer l'argent des contribuables pour réparer les dégâts causés par certaines entreprises ou banques.
Toutes ces règles économiques ont donc été créées de toute pièce par une caste d'hommes, non pas pour s'adapter à la réalité, mais pour mettre la réalité à leur service comme s'ils avaient le pouvoir de la façonner à leurs désirs. Et actuellement, la réalité - la nature, l'environnement, les humains - est en train de nous rappeler à l'ordre.
Voici la manière dont Vandana Shiva commente cela dans son livre « 1% - Reprendre le pouvoir face à la toute-puissance des riches », Ed. Rue de l’Échiquier, (2019) :
« Hier comme aujourd'hui, les super-riches utilisent les gouvernements pour concevoir des lois et des règlements les autorisant à accumuler de la richesse ad libitum. Hier comme aujourd'hui, ils créent des monopoles en annexant les biens communs et en tuant la concurrence. »
ou encore
« Grâce aux règles du jeu qu'elles fixent elles-mêmes, les personnes riches à la tête des entreprises transfèrent des pans entiers de l'économie entre les mains du secteur privé. Celui-ci utilise alors son pouvoir pour contourner les gouvernements, les corrompre ou acheter la démocratie.
...
Dans certains cas, 1% de la population se sert de sa richesse pour acheter les institutions, façonner la politique mondiale et fausser les priorités publiques sans avoir de comptes à rendre ni être soumis à une examen démocratique. Le fait même que ce 1% contrôle la richesse de 99% restants est révélateur de la désintégration de la démocratie et de la justice. »
[voir Ref 39 : https://www.ruedelechiquier.net/essais/238-1-.html]
Vandana Shiva, toujours dans son livre, évoque la mainmise des pouvoirs économiques sur la gouvernance et la démocratie :
« La démocratie représentative "des individus, par les individus, pour les individus" se transforme rapidement en une démocratie "des entreprises, par les entreprises, pour les entreprises". Pire, la concentration du pouvoir économique entre les mains d'un petit groupe de personnes non élues et n'ayant aucun compte à rendre aboutit à l'exercice d'un pouvoir politique de fait qui influence les gouvernements, les lois et les prises de décision et façonne l'avenir de notre alimentation, de notre santé et de notre planète. »
Nos états et toutes les organisations transnationales ont adapté leurs règles pour permettre à ceux qui sont positionnés vers le sommet de la pyramide des richesses de continuer à dilapider le bien commun tout en laissant les miettes pour la base de la pyramide (les gens qu'ils exploitent et maintiennent dans l'ignorance), et suffisamment de confort et de bénéfices de complaisance à ceux qui se trouvent aux étages en-dessous d'eux, de manière à ce que ceux-ci acceptent de les maintenir au sommet.
Notre système économique est aussi, directement ou indirectement, à l’origine de toutes les dérives sur la planète - de laquelle nous ne pouvons pourtant pas nous échapper. Car il favorise les guerres dans toutes les parties du monde, il est bien sûr à l’origine du réchauffement climatique, de la réduction de la biodiversité, de la pollution tant des terres que de l'air et de l'eau - les océans débordent de détritus. Il est à l’origine de l’épuisement d’une bonne part des ressources naturelles. Certaines villes manquent déjà d'eau, les pics de température lors de canicules atteignent déjà la limite de la survie à plusieurs endroits sur le globe. Les sécheresses et incendies concernent de plus en plus de territoires, de même que les inondations de plus en plus fréquentes et dévastatrices. Nous avons ainsi créé les conditions non intentionnelles mais bien réelles, de plus en plus probables, d'un suicide collectif universel duquel j'espère encore que nous pourrons échapper.
Quand un système arrive à des dérives de cette taille, inimaginables, il est grand temps de ne plus se contenter à se laisser dire que c'est compliqué, et de nous mouiller pour tenter de sauver ce qui peut l'être encore.
Quand les règles du jeu sont absurdes et injustes, l'essentiel ne passe pas par la violence ou la désobéissance aux règles. L'essentiel c'est de sortir du jeu le plus rapidement possible.
Dans ce système pervers qui permet aux plus riches de définir les règles, les représentants politiques n'ont pas du tout le pouvoir que l'on croit leur déléguer. Ils sont soit eux-mêmes impliqués dans les dérives, en faisant partie de divers conseils d'administration d'entreprises, en participant aux mêmes think tank et vont donc pousser à légiférer dans le sens du profit. Et quand ils ne sont pas directement impliqués, ils sont en général pieds et poings liés face à la situation, car s'ils tentent de reprendre les rennes, les entreprises menacent immédiatement de délocaliser, de quitter le territoire ou encore de restructurer et licencier en masse. C'est donc bien le système économique délétère qui dicte une grande part de nos lois. Et c'est sans compter le fait que les élus sont sous l'influence massive des lobbies, dont la plupart défendent les intérêts des grandes entreprises et donc des intérêts financiers.
Et le citoyen assiste en général impuissant. Soit il ne comprend pas et persiste à se fier aux autorités, ou en tout cas, dans la toute grande majorité des cas, à rester passif face à la situation ; d'autant plus lorsqu'il peut en obtenir quelques bénéfices. Soit il se révolte, s'oppose, tente de freiner les dérives, d'exiger des réformes, de proposer des alternatives, mais avec si peu de résultats, que l'énergie investie dans l'action est presque totalement à perte. Et pourtant le pouvoir est entre ses mains s'il découvre comment l'exercer.
Tout d'abord, il est nécessaire de se rendre compte que, malgré d'énormes différences culturelles, si on y regarde de plus près, les humains ont tous les mêmes besoins. C’est la manière d’y répondre qui varie, mais pas tant qu’on ne l’imagine.
D'autres part, nous sommes malgré tout plus de 8 milliards (8.000.000.000) pour à peine quelques centaines de milliers de représentants politiques, et seulement quelques milliers (x.000) de ministres (ou équivalent) ; soit (et de manière très approximative) un ministre (ou équivalent) pour environ 1 million de personne.
Or dans la société actuelle, et au niveau mondial, actuellement, le machisme est partout, la soif de profit aussi, et l’écologie nulle part (ou quasi), sauf dans les peuples premiers. Et la prise de conscience de cet état de fait est en train de se faire au niveau mondial.
Même les gouvernements, malgré des frictions dans tous les sens, sont de plus en plus conscients que l’objectif de l’environnement devient urgent et que nous le partageons tous. Et les gestes ne vont pas tarder à suivre. Cependant, la lenteur des prises de conscience et prises de décisions reste affligeante.
Et si on se rend compte qu’on est dans une courbe ascendante au niveau du désastre écologique en cours, on peut déjà voir que la courbe n’est déjà plus du tout horizontale, et que les mois et années qui viennent vont la voir se rapprocher de la verticale. Dans ce cadre, la vitesse des décisions et des changements finiront par devenir fulgurants, en rapport avec la taille des crises qui vont se cumuler et même se combiner. Mais l'action politique aura toujours quelques longueurs de retard.
Et en ce sens, chaque citoyen (chaque petit pion parmi les 8 milliards, face aux quelques milliers à traîner la patte) a intérêt à agir en amont des décideurs, non seulement pour parer à leur retard de décision, mais aussi pour les amener plus rapidement à ces décisions. Car, excepté quelques décisions prises sous la pression des manifestations, grèves, boycott, et autres actes plutôt rebelles ; en général les politiques suivent tout simplement le courant, la masse, ou la manipulation des lobbies. Or le courant, la masse, c'est nous. Dès lors les solutions consistent à multiplier toutes les idées, initiatives, et faire notre part, plutôt que nous battre contre ce qui ne marche pas.
« On ne change jamais les choses en combattant la réalité existante. Pour changer quelque chose, construisez un nouveau modèle qui rendra inutile l'ancien. »
Buckminster Fuller
Notre système économique ressemble à une tour construite anarchiquement.
Cette tour ne peut à terme que s'écrouler. Jusqu'à présent on se contente de continuer à additionner les pièces les unes sur les autres. Le sommet de la tour s'est déjà à plusieurs reprises écroulé, et on a de justesse évité le pire. Mais tant qu'on continue à construire sur cet amas instable, on ne fait qu'augmenter les chances que le tout s'écroule. La logique fait que jusqu'à présent les surfaces sur lesquelles sont posées les pièces, sont suffisantes pour supporter le poids des pièces supérieures et garder l'équilibre.
Nous n'avons le pouvoir ni de déconstruire la tour ni de la faire sauter (car nous n'avons jusqu'à présent pas encore de système alternatif suffisamment viable, pas plus qu'une planète B). Par contre nous avons chacun le pouvoir de participer à la construction d'une tour solide, stable et équilibrée à côté, en désinvestissant petit à petit le poids qui se trouve dans chaque élément de l'ancienne tour. La tour anarchique survivra encore alors un certain temps, sans forcément s'écrouler. Mais les injustices diminueront.
Ceci sera développé en deuxième partie dans le chapitre sur la balance à plateau.
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Table des matières
PREMIÈRE PARTIE : POSER LE PROBLÈME – QUE SE CACHE-T-IL DERRIÈRE LES MOTS DE L'ARGENT ET DU PROFIT
B) RICHESSE ET PAUVRETÉ FONCTIONNENT PAR VASES COMMUNICANTS DE MANIÈRE SYSTÉMIQUE
C) L'ARGENT - LES RÔLES INDIRECTS ET DÉTOURNÉS QUI LUI SONT ATTRIBUÉS
1. Moyen de subsistance, et bien au-delà
2. La reconnaissance et son exploitation commerciale
3. L'argent n’est pas neutre – pouvoir et autres dérives
D) LE CONCEPT DE PROFIT ET LES VALEURS QUE CELA SOUS-TEND
1. Profit équitable ou profit abusif
2. L'indécence des dividendes - quelques données chiffrées
E) LES CONSÉQUENCES DU PROFIT ET DES RÔLES INDIRECTS DE L'ARGENT
1. Les conséquences matérielles de l'appât du gain
a - les dérives dans l'industrie : quand la fin justifie tous les moyens
b - Répartition inéquitable de l'argent - Les écarts de richesses
2. la classe la plus riche, de loin la plus destructrice
F) LES CONSÉQUENCES DE L’APPÂT DU GAIN SUR LES MENTALITÉS
2. L’argent corrompt et pervertit
3. La course pour grimper vers plus de richesses
4. La complaisance des consommateurs
G) LES CROYANCES IMPLICITES CONCERNANT L'ARGENT
1. L'argent doit être une ressource limitée
2. Il faut travailler pour gagner sa vie
3. Les gens riches sont plus heureux
4. La richesse se mérite, donc implicitement la pauvreté aussi
5. Il faut travailler dur pour bien gagner sa vie
7. L'augmentation du coût de la vie, l'inflation, la dévaluation de la monnaie
8. Être riche ne nuit à personne
9. En économie, ce qui est légal est moral
10. L'économie c'est une science, complexe - il faut se fier aux experts
11. Ce sont les politiques qui détiennent le pouvoir
12. La croissance est bonne pour l'économie
a - Effet logarithmique de la croissance
b - Empreinte écologique et jour du dépassement
H) LES PRINCIPAUX VÉHICULES DE LA CULTURE DU PROFIT
2. Les médias de l’information
4. Les médias du divertissement et en particulier, la télévision
B) LES ALTERNATIVES QUI RESTENT A LA MARGE
1. Nous ne sommes pas encore prêts
2. Les solutions font encore partie du problème
C) ABANDONNER NOS CROYANCES SUR LA CROISSANCE, ET BOULEVERSER LA LOGIQUE DE L'EMPLOI
D) DÉCOUPLER TRAVAIL ET ARGENT - L'ALLOCATION UNIVERSELLE
1. Moins de travail à pourvoir
2. Créer la motivation à travailler
4. Financement de l'allocation universelle
5. L'allocation universelle donnerait du pouvoir à ceux qui actuellement n'y ont aucunement accès
E) DÉCOUPLER L'ARGENT DE LA RECHERCHE DE PROFIT
1. Créer une économie qui n'est plus régie par l'argent
- Le rôle des initiatives citoyennes
2. Une seule initiative et l'effet boule de neige
3. Construction de la nouvelle tour
4. Quelques exemples de changements concrets à venir dans la société
a - La démocratie participative
e - Les entreprises démocratiques se multiplieront, voire se généraliseront
F) DIMINUTION DU RÔLE DE L'ARGENT
2. Le vrai rôle que devrait avoir l'argent
a - Réduire l'utilisation et le rôle de l'argent
b - Apprendre à échanger sans compter
c - La diminution de l'importance de l'argent dans nos vies
TROISIÈME PARTIE : LE CONTEXTE DU CHANGEMENT
B) AMENER LE VIRAGE POLITIQUE VIA LES MOUVEMENTS CITOYENS
C) BALANCE A PLATEAU : ALLER VERS L'ALTERNATIVE
D) NOS PETITS PAS INDIVIDUELS SONT CAPABLES DE GÉNÉRER DE GRANDES MARRÉES CITOYENNES
E) PROFILS DE CITOYENS : LES CONDITIONS POUR CHANGER
QUATRIÈME PARTIE : LE CHANGEMENT DU NIVEAU DE CONSCIENCE
1. Qui est en premier concerné
2. De quel changement individuel parle-t-on : tout d’abord, dans le concret
a - La responsabilité d’agir même si on est seul à le faire
b - Et si la notion de goutte d'eau dans l'océan s'avérait totalement fausse ?
c - Cesser de leur donner du pouvoir
d - Liberté - autonomie - solidarité
b - Conscience et technologies
c - Conscience et solutions nouvelles
d - Dénouer les nœuds qui sont dans nos têtes
e - Changer la couleur de nos lunettes : changer notre mode de pensée
f - Bousculer l'édifice de nos croyances
g - Saut d'évolution de l'humanité
4. Dépasser les freins au changement :
a - Sous hypnose : nos doutes, notre passivité, notre conformisme, notre lâcheté
c - La difficulté d'aller à contre courant – la soumission à l’autorité de Milgram
d - Mettre des mots sur ce qui est implicite afin d’en éviter les incohérences
e - Quitter notre mentalité va nous faire peur
f - Le choix du pessimisme sous prétexte de réalisme
A) QUAND NOS SOLUTIONS MAINTIENNENT LE PROBLÈME TOUT EN LE RENDANT MOINS VISIBLE
B) PRIVILÉGIER LES RAISONS DU CŒUR AU RAISONNEMENT CARTÉSIEN
4. Notre recours à la rationalité nous mène souvent en bateau : une atèle sur une jambe de bois
5. Une solution qui ne porte pas - toute rationnelle qu'elle puisse être - n'est pas une solution
8. Notre incapacité à gérer correctement nos découvertes et inventions scientifiques
9. De nouvelles références pour guider nos choix
a - En quoi consiste le rapport de force ?
b - Lâcher le rapport de force
c - Nous fonctionnons dans le rapport de force comme nous respirons
d - Les enjeux du rapport de force ou de son absence
e - La violence n'est jamais loin du rapport de force, la non-violence non plus
f - Comment les rapports de force imprègnent toutes nos conceptions
i La mentalité basée sur le rapport de force
ii Notre incapacité à envisager les conflits en dehors du rapport de force
iii Une société de dominants et de dominés : le rapport de force est partout
vi rapport de force et confiance en soi
vii rapport de force et libre arbitre
g - Comment les rapports de force définissent notre vie sociale et nos dépenses
ii Les sphères d’influence sociales, culturelles et commerciales
iii Rapport de force dans le cadre professionnel
iv Rapports de force et monde virtuel – école de narcissisme
vi Rapports de force, consommation, et recherche de profit sont foncièrement et intrinsèquement liés
- les comportements de compétition
- les comportements d'exigence
- les comportements de défense de nos privilèges
vii quitter le rapport de force mène à se désintéresser des richesses et de la consommation
h - Rapport de force à l'échelle collective
3. Connaissance de soi : notre part d'ombre
b - Rapport de force versus empathie - les deux facettes de l'être humain d'aujourd'hui
i Ambivalence des comportements
- l'attitude face aux inconnus
- l'attitude face à l'entourage
- Un interrupteur dans la tête et l'apprentissage de stratégies pour y remédier
iv découvrir les effets de l'interrupteur
v apprendre à gérer l'interrupteur
vi la gestion de l'interrupteur sur la durée
vii Accepter notre part d'ombre c'est accepter celle des autres
c - Le capitalisme exploite notre part d'ombre
d - La part d'ombre et le rôle des citoyens en transition
e - La part d'ombre et le rôle des crises
f - Facteurs favorisant ou non la propension à utiliser le rapport de force
h - Evolution personnelle et déni de réalité
i Fuir totalement l'actualité nous fait perdre contact avec la réalité
ii Quand utiliser la loi de l'attraction devient magique
iii Évoluer dans un monde de bisounours
4. Quitter le rapport de force - accueillir notre part d'ombre via un réel travail psychologique
a - L'étape incontournable : commencer par reconnaître notre part d’ombre
b - Part d’ombre et rapport de force
d - Les attitudes mentales à privilégier
iii Faire évoluer les demandes et propositions en traversant les échecs, en apprenant de nos erreurs
e - Se mettre dans la bonne disposition d'esprit
iv Exploiter l’émotion sans agir sous son emprise
v Une forme de connaissance de soi
vii La présence de doutes dans la confiance
viii Le respect et la bienveillance absolue
f - Quand le rapport de force s’éloigne, l’empathie et la solidarité peuvent apparaître
i - Notre part d'ombre est notre alliée
j - La différence entre la compréhension et la conscience
k - Pour prendre de la perspective
SIXIÈME PARTIE : LES FACTEURS D'INFLUENCE DU CHANGEMENT
2. Conscientiser, chercher à influencer : c'est se tromper
3. La réelle influence s'opère loin des discours
4. Notre rôle de colibri et son effet boule de neige
5. L’influence des médias de l’information
7. L’éducation et l’enseignement – y compris le rôle qu’y joue le web
9. Catalyseurs d’un autre genre
d - La contagion de l'altruisme
e - Les champs morphiques (ou morphogénétiques)
f - La transmission de toutes nos pensées et émotions
VERS UNE UTOPIE NON DÉCONNECTÉE DE LA RÉALITÉ
- Un dernier petit coup de pouce
ANNEXE Un détour par la théorie polyvagale
ICI COMMENCE LE DEUXIÈME VOLET DE CE LIVRE