Quand cesse la culture du profit

 

 page 2 <<<< page 3 >>>> page 4

E) LES CONSÉQUENCES DU PROFIT ET DES RÔLES INDIRECTS DE L'ARGENT

1 .Les conséquences matérielles de l'appât du gain

a - les dérives dans l'industrie : quand la fin justifie tous les moyens

Dans de nombreux cas, pour maximiser les profits, la production des biens est délocalisée dans des pays où la main d’œuvre est payée avec des salaires de misère, avec des conditions de travail infernales, sans congé, sans jour de repos hebdomadaire, sans droits syndicaux, avec des journées de 18 heures, etc. Et à l'inverse, les actionnaires de ces mêmes entreprises, vivent pour la plupart dans les pays occidentaux. Ils ont non seulement le privilège de pouvoir se permettre d'acheter des actions, mais ces actions font croître rapidement leur patrimoine alors qu'ils n'ont qu'à se croiser les bras pour voir entrer l'argent. Les droits et l'argent dont les premiers ne peuvent pas bénéficier sont directement en relation avec les privilèges dont les seconds bénéficient.

Si je cite des cas extrêmes c'est parce qu'ils ne sont pas l'exception. Le système des zones franches permet de stimuler une telle culture d'entreprise, loin de nos yeux. Et même lorsque le salaire et les conditions de travail restent dans les limites de l'acceptable, le décalage entre l'argent comme revenu du travail, et l'argent comme revenu du capital reste totalement injustifié.

De plus, les multinationales s'adonnent largement à la fraude fiscale. Elles ne le font pas forcément dans l'illégalité. Mais en étant présentes dans plusieurs pays, elles actionnent les leviers qui les arrangent pour bénéficier d'avantages fiscaux dans certains pays, contourner la fiscalité dans d'autres en se jouant des lois et en exploitant toutes les failles et vides juridiques, et enfin, elles sont nombreuses à s'implanter dans les paradis fiscaux afin de rendre tout cela bien opaque.

L’article « Pour en finir avec les paradis fiscaux et l'opacité fiscale », de Christian Chavagneux, dans la revue « Constructif », n°51, (2018), de Cairn.info cite plusieurs chiffres qui concernent l’évasion fiscale des entreprises dans le monde :

« Côté entreprise, pour l'OCDE, les pertes de recettes d'impôt sur les sociétés dans le monde se situent entre 100 et 240 milliards de dollars, une estimation présentée par l'institution comme fondée sur « un choix d'hypothèses très conservatrices ». Une étude des Nations unies propose, en effet, un ordre de grandeur de l'ordre de 500 milliards de dollars, et Gabriel Zucman, de 600 milliards, soit 40 % des profits des multinationales, faisant perdre environ un quart de l'impôt sur les sociétés au niveau mondial. »

[Source : https://www.cairn.info/revue-constructif-2018-3-page-11.htm]

Et ces impôts qui restent impayés sont une manière très efficace de retirer le pouvoir de nos gouvernements à gérer leurs budgets et à maintenir tant d’injustices sociales.

Et c’est sans compter que pour engranger du profit (pour les actionnaires) de nombreuses entreprises sont prêtes à nuire autour d’elle, peu importe de quelle manière. Certains domaines sont plus particulièrement touchés : on peut citer par exemple l’industrie de l’armement, l’industrie pétrolière, l’industrie pharmaceutique, l’industrie agroalimentaire, l'industrie du tabac, l'industrie automobile, ainsi que les banques. Directement ou indirectement, certaines entreprises sont ainsi prêtes à envoyer des gens à la misère ou à la mort, tout comme à œuvrer à l’extinction des espèces, à la dilapidation des ressources naturelles, au réchauffement climatique, à la pollution sous toutes ses formes, mais aussi à empêcher les alternatives à leur mode de fonctionnement de se développer.

Les entreprises les plus importantes, les plus profitables et les moins éthiques (et cela va en général de pair) vont dès lors entraîner les autres entreprises dans leur sillage. Car dans ce contexte et avec les politiques économiques actuelles, la concurrence exige de jouer des coudes, de rogner sur les coûts à tous les échelons de la production. Les entreprises locales se maintiennent si elles défendent un commerce de niche, sinon elles sont absorbées par plus grand qu'elles ou simplement disparaissent.

Pour survivre il faut croître, innover, pour ne pas voir la clientèle filer vers le concurrent. Et cette attitude se décline à tous les échelons de l'industrie et du commerce dans la société.

Il n'existe aucune éthique possible dans le concept de l'actionnariat, même si l'on réduit les proportions des injustices qu'il génère. L'idée que la peine, la souffrance, et même la survie des uns, puisse dépendre de l'enrichissement des autres (déjà riches), ne peut correspondre à aucune valeur éthique.

Si vous voulez vous faire une idée de la situation en parcourant les données en détails de milliers d'entreprises, je vous conseille d'aller faire un tour sur le site :

[Source : http://fr.transnationale.org/].

Il n'a plus été mis à jour depuis apparemment plus de 10 ans, mais regorge d'informations sur toutes les entreprises qui y sont mentionnées ; ce qui donne un aperçu de la taille et de la généralisation des dérives. Et en dix ans, tout cela a empiré, et de manière exponentielle.

Seules les petites entreprises, réellement locales, produisant des biens ou services utiles et répondant à certaines valeurs éthiques, peuvent en partie s'affranchir des règles de ce système inique. Sinon, la plupart des entreprises, restent directement dépendantes de la toile commerciale globalisée impliquant toutes ces dérives.

b - Répartition inéquitable de l'argent - Les écarts de richesses

La disproportion entre les revenus des uns, et ceux quasi nuls des autres, défie le bon sens. Nous sommes arrivés actuellement à une situation où les inégalités de richesses sont extrêmes et ne cessent de s'accentuer.

Je vous suggère de regarder la vidéo du film de Denis van Waerebeke écrit avec Sabrina Massen, « Comment nourrir le monde », (2013 – 9’03’’), référencée ci-dessous, car elle est très didactique, et esquisse l'état du monde actuellement. Elle montre de manière schématique une part des cercles vicieux qui entraînent les uns à s'enrichir, les autres à s'appauvrir jusqu'à la misère et la mort. Et même si vous êtes très informé sur le sujet, ce sera une bonne piqûre de rappel -

[Ref 2 : https://www.youtube.com/watch?time_continue=537&v=gBsBxpaG7b8].

Pour mieux visualiser les grands écarts entre les revenus et possessions des uns et des autres, j'ai également rassemblé quelques informations chiffrées. J'aurais pu décider de lister toutes ces données chiffrées différentes dans une annexe afin d'éviter de donner la nausée aux lecteurs. Mais j'ai décidé de ne pas vous épargner. Car c'est justement parce que nous refusons de regarder ces chiffres en face que nous restons complaisants avec cette situation.

Ces données concernent à la fois les écarts de revenus, les écarts dans l'évolution de ces revenus, et ensuite les écarts de patrimoines, et les écarts de taxation.

Prenons tout d'abord les revenus du travail

Le site du Journal du Net :
Source : https://www.journaldunet.com/business/salaire/classement/pays/revenus] donne un aperçu du revenu moyen en dollar pour chaque pays. Cela n'indique pas la taille des écarts salariaux à l'intérieur même du pays, mais offre déjà une vision claire des inégalités dans le monde. Par exemple : en 2016, et sur base des données publiées par la Banque Mondiale, le salaire mensuel moyen en Norvège, était le plus élevé au monde avec 6865,8$ alors que le salaire mensuel moyen au Burundi n'atteignait que 23,3$. Le rapport est proche de 1 à 300. La différence du coût de la vie dans ces deux pays, qui est certainement importante, ne peut malgré tout en rien justifier un tel écart. Et il ne s'agit que de salaire moyen.

Si on se base sur les données du site de Forbes -

[Source : https://www.forbes.fr/classements/les-salaires-en-milliard-des-patrons-les-mieux-payes-du-monde/?cn-reloaded=1], et que l'on prend cette fois les salaires les plus élevés au monde, obtenus par certains gérants de fonds d'investissement, on obtient le chiffre ahurissant, atteint par certains, de près de 1,5 milliard d'euros en 2015 soit 4 millions d'euros par jour. A l'autre extrême, selon le site de l'Observatoire des Inégalités, en 2019, 10% de de la population mondiale, soit 740 millions de personnes, vivaient avec moins de 1,70 euros par jour.

[Source : https://www.inegalites.fr/L-extreme-pauvrete-dans-le-monde-recule].

Soit un rapport cette fois de 1 à près de 2 millions et demi (2.350.000) entre les salaires des plus riches et des plus pauvres.

Selon le site français de l'Observatoire des Inégalités -

[Source : https://www.inegalites.fr/Combien-gagnent-les-habitants-de-la-planete], les revenus moyens mensuels, en 2021, selon que l'on fasse partie des 50% les plus pauvres, des 49% les plus riches, ou des 1 % ultra-riches, sont les suivants : 233€, 2058€, et 26.800€. Soit un rapport moyen d'environ 1 à 115 entre les revenus moyens de la moitié la plus pauvre de la population, et ceux des 1% les plus riches.

Bien sûr, tous ces chiffres sont relatifs, vu qu'ils proviennent de sources différentes, concernent des années différentes, sont calculés à partir de monnaies différentes, et que pour nombres d'entre eux, il ne s'agit que d'évaluations vu que, tant dans les populations les plus pauvres que parmi les plus riches, tous les salaires ne sont pas déclarés, comptabilisés, etc.

Mais quelle que soit la taille des erreurs dans ces informations, elles ne peuvent combler le gigantisme des inégalités que ces chiffres démontrent.

Et si l'on regarde du côté des impôts, c'est-à-dire, de la contribution financière de chaque travailleur, pour alimenter les rouages de la société dans son pays ; ces impôts ne sont actuellement que rarement supérieurs à 50%. Ce n'était pas le cas au siècle passé, comme par exemple aux États-Unis, dans la citation suivante de Esther Duflo, reprise dans l’article : « Pas d'urgence à rembourser la dette, mais il faudra le faire, selon la prix Nobel d'économie Esther Duflo » de l’agence Belga, repris par la RTBF :

« ...dans l'Amérique d'Eisenhower, les taux d'imposition sur les revenus les plus importants étaient de 95-96%. »

[Source : https://www.rtbf.be/info/economie/detail_pas-d-urgence-a-rembourser-la-dette-mais-il-faudra-le-faire-selon-la-prix-nobel-d-economie-esther-duflo?id=10698303]

Donc, non seulement l'indécence des revenus du travail est immense du côté des plus riches, mais en plus, leurs impôts ne sont pas proportionnellement plus élevés que ceux des travailleurs de la classe moyenne.

A ce sujet, Oxfam – qui fait un travail prodigieux en publiant régulièrement des rapports, et ouvrant de la sorte des brèches dans nos mentalités, nos croyances - a publié en janvier 2023 un rapport : « La loi du plus riche - Pourquoi et comment taxer les plus riches pour lutter contre les inégalités » qui ne se contente pas d’analyser la situation, mais effectue des propositions très concrètes pour parvenir à taxer les plus riches -

[Source : https://oxfammagasinsdumonde.be/content/uploads/2023/01/Davos_2023_french_full_report.pdf].

Et ces dérives sont de plus en plus marquées si l'on regarde l'évolution des revenus dans le temps.

Selon un autre article publié par l'Observatoire des inégalités -

[Source : https://www.inegalites.fr/Qui-profite-de-la-croissance-des-revenus-dans-le-monde?id_theme=26-

si l'on prend les chiffres globaux de la croissance mondiale des revenus entre 1980 et 2016 ils se répartissent comme suit :

Pour les 50% les plus pauvres de la population : la part de la croissance des revenus qui leur a été attribuée a été de 12% de l'ensemble des montants d'augmentation au niveau mondial.

Pour les 49% les plus riches de la population (hors 1% des ultra riches) : la part de la croissance des revenus qui leur a été attribuée a été de 61% de l'ensemble des montants d'augmentation au niveau mondial.

Tandis que pour le 1% des ultra riches dans le monde : la part de la croissance des revenus qui leur a été attribuée a été de 27% de l'ensemble des montants d'augmentation au niveau mondial.

Si l'on regarde cela à l'échelle individuelle ; cela veut dire que l'augmentation moyenne des revenus de chaque personne ultra riche aura été près de 113 fois plus importante que celle de chaque personne appartenant à la moitié la plus pauvre de la population et qu'elle aura été près de 22 fois supérieure à celle de chaque personne appartenant à la moitié la plus riche de la population mondiale (hors 1% des ultra riches). Exprimé en pourcentage cette fois, la personne ultra riche obtiendrait une augmentation qui équivaudrait à 94,79% du gâteau, le riche obtiendrait 4,37% de cette même somme et le pauvre 0,84% - alors que, nous l'avons vu ci-dessus, les inégalités de revenus sont déjà à la base monumentales.

Et une fois encore, ce ne sont que des chiffres moyens.

Le niveau de revenu moyen de la moitié de la population mondiale la plus pauvre a malgré tout doublé pendant cette période (1980-2016) ; ce qui a permis à des populations très nombreuses de sortir de la misère la plus extrême tout en restant pauvre. Car, étant donné que les revenus des plus pauvres sont nuls ou proches de zéro pour partie d'entre eux ; doubler presque rien, consiste à rester vraiment très peu. Or les ultras riches étaient déjà riches à la base, et n'avaient pas besoin de s'enrichir davantage, alors que les pauvres avaient besoin de plus d'argent afin de survivre.

Remarque : Et en ce qui concerne les 10 hommes les plus riches du monde ? : leur fortune a tout simplement plus que doublé pendant la pandémie, alors que la toute grande majorité des gens se sont appauvris.

Toujours concernant l'évolution dans le temps des écarts des revenus du travail, voici les résultats d'une autre étude mentionnée dans le rapport de Oxfam intitulé « Transition écologique et inégalités mondiales – Pour une approche solidaire et équitable face aux enjeux sociaux et climatiques » signé par Roland d'Hoop et publié en décembre 2019 :

« ... deux économistes de Harvard et du Federal Reserve Board, Carola Frydman et Raven  E. Saks, ... ont comparé le rapport entre le salaire gagné par les trois premiers dirigeants des 500 plus grandes entreprises américaines et le salaire moyen de leurs employés. Cet indicateur de l’évolution des inégalités reste stable des années 1940 jusqu’aux années 1970 : les patrons des entreprises considérées gagnaient environ 35 fois le salaire moyen de leurs employés. Puis se produit un décrochement à partir des années 1980, et le rapport monte de façon assez régulière jusqu’à atteindre environ 130 dans les années 2000. »

[Source : https://oxfammagasinsdumonde.be/content/uploads/2021/02/OMM-Transition-et-Nord-Sud-web.pdf]

Actuellement, il est à parier que cet écart moyen aura encore augmenté très largement. Pourtant, quintupler ou décupler un salaire est déjà par essence totalement inéquitable.

Or ces écarts sont tout simplement décidés par ceux qui en bénéficient.

La RTBF le mentionne dans l’article : « USA: l'écart entre le salaire des grands patrons et de l'employé moyen, de plus en plus grand » par L.V. , 2019

« L’écart entre les salaires des cadres dirigeants et les plus bas salaires dans une même entreprise, ne font que croître. Or quand de tels écarts existent, il ne s’agit plus d’une question de compétence, mais bien d’une question de pouvoir. »

[Source : https://www.rtbf.be/info/economie/detail_usa-l-ecart-entre-le-salaire-des-grands-patrons-et-de-l-employe-moyen-de-plus-en-plus-grand?id=10293071]

A ce sujet, voici une vidéo intéressante, qui fait comprendre à quel point la répartition des pouvoirs dans notre société, et en parallèle, de l'argent, n'est pas tant la conséquence du dessein d'un cercle de privilégiés ; mais bien plus le résultat de la combinaison des incompétences et d'une avidité pour le pouvoir et le profit, chez une majorité de ceux qui détiennent ce pouvoir et ces profits. Il s'agit de la  vidéo de la conférence TEDx (en anglais) de Tomas Chamorro-Premuzic, psychologue du travail et des organisations : « Pourquoi tant d'hommes incompétents deviennent-ils dirigeants ? » -

[voir Ref 9 : https://www.youtube.com/watch?v=zeAEFEXvcBg].

Cependant, les écarts de revenus du travail ne sont qu'une partie des inégalités qu'il faut compléter par les écarts de patrimoine (possessions et revenus d'investissements) :

Dans son livre « Comment les riches détruisent la planète », (2007), Ed. Du Seuil, Hervé Kempf, évoque un rapport de 1 à 64 pour le patrimoine moyen des franges de population (10 %) les plus riches et les plus pauvres.

Et seulement 5 % de la population tient entre ses mains la presque totalité des actions en bourse.

[voir Ref 38 : https://www.seuil.com/ouvrage/comment-les-riches-detruisent-la-planete-herve-kempf/9782020896320]

En février 2020, les dix hommes les plus fortunés du monde avaient plus de richesses que les 85 pays les plus pauvres -

[Source : https://www.rtl.be/info/monde/economie/les-dix-hommes-les-plus-fortunes-du-monde-ont-plus-de-richesses-que-les-85-pays-les-plus-pauvres-1195359.aspx]

En 2016, Oxfam déclarait déjà que les 1% des plus riches de la planète, possédaient plus que les 99% de la population mondiale -

[Source : https://www.oxfam.org/fr/communiques-presse/62-personnes-possedent-autant-que-la-moitie-de-la-population-mondiale].

En 2017, on nous annonçait dans l'actualité que les 8 personnes les plus riches au monde détenaient autant que la moitié la plus pauvre de la population mondiale, à savoir : plus de 3,5 milliards de personnes.

Ces chiffres étaient nettement plus faibles il y a encore quelques années.

Vandana Shiva nous en fait l'historique dans son livre (déjà cité) « 1% - Reprendre le pouvoir face à la toute-puissance des riches », (2019), Ed. Rue de l’Échiquier :

« Tandis que la fortune des 62 personnes les plus riches du monde augmentait de plus de 45% entre 2010 et 2015 - soit une hausse de 542 milliards de dollars, établissant cette fortune à 1760 milliards de dollars -, la richesse de la moitié la moins aisée de l'humanité chutait d'un peu plus de 1000 milliards de dollars dans le même laps de temps, soit une baisse de 38%. En 2010, 388 personnes possédaient autant de richesses que la moitié la moins riche de l'humanité ; en 2011, elles n'étaient plus que 177 ; 159 en 2012 ; 92 en 2013 ; 80 en 2014 ; en 2017, elles étaient seulement 8. »

[voir Ref 39 : https://www.ruedelechiquier.net/essais/238-1-.html]

Dans le rapport de Oxfam déjà cité et intitulé « Transition écologique et inégalités mondiales - Pour une approche solidaire et équitable face aux enjeux sociaux et climatiques » publié en octobre 2019, Roland d'Hoop écrit ceci :

« Dans un rapport publié en janvier 2019, Oxfam révèle que la fortune des milliardaires a augmenté de 12 % en 2018, soit de 2,5 milliards de dollars par jour ou 900 milliards en un an, tandis que les 3,8 milliards de personnes qui composent la moitié la plus pauvre de l'humanité ont vu leur richesse diminuer de 11 %. »

Un peu plus loin, il ajoute :

« En étudiant l’évolution de la répartition des richesses dans le monde entre 1988 et 2008, on remarque en effet que 44 % des gains absolus sont allés aux 5 % les plus riches de la population mondiale. »

Et puis enfin :

« ... la moitié la plus défavorisée de l’humanité, pourrait se trouver en danger vital. Cette moitié n’a rien reçu des richesses générées en 2017 dans le monde tandis que 82 % de celles-ci ont profité aux 1 % les plus riches du monde. »

[Source : https://oxfammagasinsdumonde.be/content/uploads/2021/02/OMM-Transition-et-Nord-Sud-web.pdf]

Et cela n'est pas près de s'arrêter. Encore en 2022, un article d'Oxfam intitulé : « La fortune des dix hommes les plus riches du monde a doublé pendant la pandémie alors que les revenus de 99 % de la population mondiale ont été moins importants à cause de la Covid-19 », évoquait ceci :

« La fortune des dix hommes les plus riches au monde a plus de doublé, passant de 700 milliards de dollars à 1 500 milliards de dollars, à un rythme de 15 000 dollars par seconde ou 1,3 milliard de dollars par jour pendant les deux premières années d’une pandémie au cours de laquelle 99 % de la population mondiale a eu des revenus moins importants que prévu et où plus de 160 millions de personnes supplémentaires auraient basculé dans la pauvreté.  »

« Gabriela Bucher, directrice générale d’Oxfam International, a déclaré : « Si ces dix hommes perdaient demain 99,999 % de leur fortune, ils seraient toujours plus riches que 99 % de toute l’humanité. Ils sont désormais six fois plus riches que les 3,1 milliards de personnes les plus pauvres. »

« La fortune des milliardaires a davantage augmenté depuis le début de la pandémie qu’au cours des 14 années précédentes. Estimée à 5 000 milliards de dollars, il s’agit de la plus forte augmentation de la fortune des milliardaires depuis que ce type de données est recensé. Un impôt exceptionnel de 99 % sur les richesses amassées pendant la pandémie par les dix hommes les plus riches du monde permettrait par exemple de :

- financer suffisamment de vaccins pour immuniser le monde entier ;

- financer la protection sociale et une santé universelle, de financer l’adaptation au changement climatique et de réduire les taux de violences basées sur le genre dans plus de 80 pays ;

- et ce, tout en laissant à ces hommes quelque 8 milliards de dollars de plus qu’avant la pandémie. »

Dans ce même article, il est cité la déclaration de Gabriela Bucher :

« L’argent ne manque pas. Ce mensonge a volé en éclats lorsque les gouvernements ont débloqué 16 000 milliards de dollars pour faire face à la pandémie. »

[Source : https://www.oxfam.org/fr/communiques-presse/la-fortune-des-dix-hommes-les-plus-riches-du-monde-double-pendant-la-pandemie]

Et au-delà des revenus, des taxes et du patrimoine, le contexte de la pandémie a permis de rendre plus visible, et même caricaturale chez les ultra riches, cette mentalité de recherche à s'enrichir :

Dans l’article « Au Royaume-Uni, le coronavirus fait fondre le patrimoine des milliardaires » de l’AFP publié dans le journal Trends Tendances, en 2020, alors qu'une importante partie de la population voyait ses revenus baisser, était mise en chômage technique, perdait son emploi, se retrouvait dans des conditions de vie très précaires ; le Sunday Times rapportait une nouvelle des plus déconcertantes. 63 membres de la liste des 1000 plus grandes fortunes du Royaume-Uni, dont 20 milliardaires :

« … ont sollicité pour leurs employés l’aide du fonds public mis en place pour la durée de la crise, et qui assure aux travailleurs 80% de leur salaire à hauteur de 2500 livres par mois. »

[Source : https://trends.levif.be/economie/banque-et-finance/au-royaume-uni-le-coronavirus-fait-fondre-le-patrimoine-des-milliardaires/article-normal-1289547.html]

Cela consiste à dire que, des personnes dont les poches débordent de millions de dollars, viennent mendier à l'état pour payer les dégâts de la crise, alors que ce même état est obligé de s'endetter pour proposer cette aide, et qu'au final ce sont les citoyens, y compris les plus pauvres qui finiront par rembourser les dettes en question, sans que les millions de dollars de ces richissimes personnages ne soient remis en question. C'est dire le niveau de culot, d'inconscience et de mépris dont ils font preuves face à leurs concitoyens.

Ou encore, toujours pour l'année 2020, repris de l’article de la RTBF « Crise sanitaire et économique : les riches encore plus riches, les pauvres encore plus pauvres » (2021) par N.J. :

« En neuf mois, les 1000 personnes les plus riches au monde, le top 1000 de la liste des milliardaires, ont récupéré l’entièreté de leur fortune. Et pour certains, les dix plus riches, il y a même eu une augmentation de cette fortune collective de 3900 milliards de dollars entre le 18 mars et la fin décembre. C’est donc une récupération vraiment éclair. À titre de comparaison, le même groupe avait mis cinq ans à récupérer sa fortune suite à la crise financière de 2008-2009. C’est donc allé très rapidement pour eux »

[Source : https://www.rtbf.be/info/societe/detail_crise-sanitaire-et-economique-les-riches-encore-plus-riches-les-pauvres-encore-plus-pauvres?id=10682005]

explique Aurore Guieu, la responsable de l’équipe Inégalités et justice fiscale chez Oxfam Belgique.

Pareil pour certaines multinationales cotées en bourse qui parviennent à tirer leur épingle du jeu en réussissant à faire grimper les actions de 125% à Wall Street -

[Source : https://www.rtbf.be/info/monde/detail_apple-ne-connait-pas-la-crise-la-firme-depasse-les-2-000-milliards-de-dollars-en-bourse?id=10566591].

Alors qu'au même moment des dizaines de millions de personnes tombent dans l'extrême pauvreté -

[Source : https://www.rtbf.be/info/societe/detail_coronavirus-selon-la-banque-mondiale-100-millions-de-personnes-pourraient-tomber-dans-l-extreme-pauvrete?id=10566159].

Quelle que soit la lorgnette par laquelle on regarde ces écarts, ces chiffres sont tous aussi affolants les uns que les autres. Nous côtoyons ces chiffres régulièrement dans les médias, que ce soient ceux qui concernent les plus riches, ou ceux insignifiants des plus pauvres.

Par contre, ils sont rarement mis les uns en face des autres. S'ils l'étaient systématiquement, nous ne pourrions plus idolâtrer ces plus riches et nous arrêterions de les enrichir davantage.

Rien ne peut justifier de tels écarts.

Comment peut-on expliquer que l'ultra richesse des uns ne puisse être partagée pour parvenir à faire survivre et vivre dignement la moitié la plus pauvre de l'humanité ?

A un niveau global, dans ce contexte, alors que la planète pourrait permettre de subvenir aux besoins de tous si elle était gérée de manière responsable, efficace et collective ; la répartition non équitable de l'argent, maintient un milliard de personnes dans des conditions de survie difficiles ou impossibles.

Si rien n’est fait rapidement, nous arriverons bientôt à ce que la personne la plus riche détienne autant que l’ensemble du reste de l’humanité. Si cela devait devenir possible, cela ne serait pas parce que cette personne aurait un pouvoir absolu sur plus de 7 à 8 milliards de personnes, ce serait parce que nous partageons tous des croyances qui nous font accepter de participer à un système totalement incohérent et qui est en train de prendre l’eau. Et que ces croyances privilégient ceux qui continuent à œuvrer pour maintenir à flot ce système.

Les plus riches continuent à s’enrichir, et les plus pauvres sont morts depuis longtemps et ont quitté les statistiques, et chacun de nous contribue au quotidien pour que cela persiste.

Et cela se reflète également au niveau des pays. Dans l’article « La dette des pays en développement a plus que doublé en dix ans, selon la Banque mondiale », 2022, par Belga, édité par Victor de Thier à la RTBF :

« La dette des pays en développement a plus que doublé durant la dernière décennie pour atteindre 9.000 milliards de dollars en 2021, a estimé la Banque mondiale (BM), soulignant que le risque de les voir basculer dans la crise s'est renforcé. »

[Source : https://www.rtbf.be/article/la-dette-des-pays-en-developpement-a-plus-que-double-en-dix-ans-selon-la-banque-mondiale-11118446]

Malgré que ces pays soient les plus pauvres, tout est fait pour encore les appauvrir, et donc empêcher les pouvoirs en place d'apporter assistance à leur population, en les obligeant, à la place, de rembourser leur dette, qui ne cesse d'augmenter.

Et avec l’accumulation des crises actuelles et à venir, la pauvreté augmente à nouveau de manière spectaculaire, et à l’autre extrême, les plus riches s’enrichissent de manière exponentielle plus rapidement et indécemment que nous ne l’avions jamais vu.

Et le fait que l’extrême pauvreté au niveau mondial ait reculé ces dernières décennies démontre qu’il y a en effet des bonnes volontés qui se démènent pour alléger les souffrances dans le monde et rétablir de l’équité. Cependant le fait que pendant tout ce temps la pauvreté n’ait pas été éradiquée prouve tout de même qu’il y a suffisamment de mauvaises volontés qui ont empêché que les efforts des premiers aboutissent totalement. Et il ne s’agit pas que de mauvaise volonté, il y a aussi et surtout l’inertie de ceux qui pourraient faire la différence, ceux qui ne sont pas responsables directement de tout cela, mais qui dans leur manière de vivre et de penser, soutiennent le problème, y participent et le perpétuent.

Petite source d'espoir :

Dans le cadre de l'OCDE, 136 pays se sont accordés pour imposer une taxation minimale à 15 % sur les multinationales. Cela pourrait freiner un chouia la course effrénée au profit, et rétablir un peu d'équité dans le système. En espérant que ce ne soit qu'un début.

[Source : https://www.lalibre.be/dernieres-depeches/afp/2021/10/08/taxation-des-multinationales-accord-a-136-pays-avec-un-taux-fixe-a-15-RR7YQHLZNZD63OZLXA7LU4MOXI/]

Une autre source d'espoir :

En septembre 2023, une lettre ouverte, signée par 300 personnes - millionnaires, économistes, représentants politiques - a été adressée aux chefs d'Etat qui allaient participer au sommet du G20 le même mois, afin - entre autres - de demander de taxer les ultra riches.

[Source : https://www.rtbf.be/article/des-milliardaires-economistes-et-politiciens-appellent-le-g20-a-taxer-les-super-riches-11251069]

Mais ces améliorations restent bien trop lentes et timides pour changer fondamentalement la donne. Bien que cela ne soit certainement pas inutile ; s'il faut se contenter d'avancées qui mettent des années à bourgeonner dans l'esprit des décideurs et bien plus d'années encore pour être décidées par un nombre suffisant d'entre eux, et encore bien plus d'années pour être mise en place, nous ne sommes pas près de voir des bouleversements se réaliser.

Dès lors, ne serait-il pas temps de songer à ce que nous pouvons faire, à notre échelle, à notre niveau de citoyens ?

2. La classe la plus riche, de loin la plus destructrice

Et non seulement la classe la plus riche de la population s’octroie tous les avantages et privilèges, abuse de ses pouvoirs ; mais il est avéré qu’elle est également à l’origine de destructions, pollutions, dilapidations plus importantes que celles engendrées par toutes les autres couches de la société.

A nouveau, selon les sources, les chiffres varient, mais la tendance est évidente : l'empreinte écologique, l'empreinte carbone, des plus nantis est désastreuse, alors que celles de plus pauvres ne nuit en rien à la planète.

L’article « Quand la minorité la plus riche de la planète émet une grande partie du CO2 », (2019) par Adeline Louvigny de la RTBF, cite 4 études et rapports de sources différentes :

« ... les 10% les plus riches représentent 26% de l’empreinte carbone totale, alors que les 50% aux revenus le plus bas… 15%. Le quart le plus riche de la population mondiale représente plus de 60% de l’empreinte écologique de l’Humanité. »

Dans le même article elle cite :

« En 2015, Oxfam avait réalisé une démarche similaire, obtenant des chiffres évoquant une inégalité encore plus criante : selon leur méthodologie, les 10% les plus riches de la planète émettent 49% du CO2 mondial. La même année, un rapport de l’économiste Thomas Piketty et Lucas Chancel allait dans la même direction : les 10% les plus riches contribuant à 45% des émissions, alors que les 50% les moins riches contribuent seulement à 13%. »

L’article va encore plus loin, citant une étude qui a évalué :

« … que l’empreinte carbone de « l’élite » mondiale était 11 fois plus élevée que celle des plus pauvres. »

[Source : https://www.rtbf.be/article/quand-la-minorite-la-plus-riche-de-la-population-mondiale-emet-une-grande-partie-du-co2-10196935?id=10196935]

Pour illustrer cela voici un schéma publié par Oxfam en décembre 2015 dans un document d'information médias sur les « Inégalités extrêmes et émissions de CO2 » :


Déciles de revenus au niveau mondial et émissions dues au mode de consommation correspondantes

[Source : https://www-cdn.oxfam.org/s3fs-public/file_attachments/mb-extreme-carbon-inequality-021215-fr.pdf]


Avant de terminer cette série de citations et références, voici quelques extraits du compte-rendu publié en septembre 2020, d'une recherche effectuée par Oxfam International et le Stockholm Environment Institute (SEI) : « Combattre les inégalités des émissions de CO2 - La justice climatique au cœur de la reprise post COVID-19 », donnant d'autres précisions sur cette situation - en sus des chiffres - sur lesquelles nous reviendrons dans des chapitres ultérieurs :

« Au cours des 20-30 dernières années, la crise climatique s’est amplifiée et le budget carbone mondial limité a été dilapidé au service d’une intensification de la consommation d’une population nantie, et non pour sortir des personnes de la pauvreté. Les deux groupes qui souffrent le plus de cette injustice sont les moins responsables de la crise climatique : les personnes pauvres et marginalisées déjà confrontées aux impacts du changement climatique et les générations futures qui héritent d’un budget carbone épuisé et d’un monde frappé de plein fouet par le dérèglement climatique. »

« Il est primordial de reconnaître que les inégalités relatives aux émissions de CO2 et fondées sur les revenus étudiées ici s’entrelacent avec d’autres structures de pouvoir associées - entres autres - au genre, à l’origine ethnique, à l’âge ou à la caste et les renforcent. Cela explique en partie pourquoi, dans de nombreux pays, les hommes blancs ont tendance à être sur-représentés dans les groupes où les revenus sont les plus élevés et les femmes de couleur à être majoritaires dans les groupes où les revenus sont les plus bas. »

« ... au cours des 20 à 30 dernières années, ... on a vu les inégalités de revenus et de richesses exploser dans la plupart des pays, à l’image des systèmes patriarcaux et colonialistes profondément enracinés qui privilégient la domination et l’enrichissement d’une poignée de personnes aux dépens du reste de la population. »

« L’empreinte carbone due à la consommation par habitant-e des 1 % les plus riches est actuellement 35 fois plus élevée que l’objectif fixé pour 2030 et plus de 100 fois plus élevée que celle des 50 % les plus pauvres. L’empreinte carbone par habitant-e des 10 % les plus riches est plus de 10 fois supérieure à l’objectif fixé pour maintenir le réchauffement en dessous de 1,5 °C d’ici 2030 et plus de 30 fois plus élevée que celle des 50 % les plus pauvres. »

« ... entre 1990 et 2015 ... les 50 % les plus pauvres (env. 3,1 milliards de personnes) étaient responsables de seulement 7 % des émissions de CO2 cumulées... »

Toujours dans le même document, Tim Gore, expert de l'ONG ajoute encore ceci :

« C'est une dichotomie fallacieuse de suggérer que nous devons choisir entre la croissance économique et le climat. »

[Source : https://oxfam.app.box.com/s/q36ywh37ppur8gl276zwe8goqr6utkej/file/719888120652]

Et puis enfin, dans le rapport « Les milliardaires du carbone » d’octobre 2022, Oxfam déclare ceci :

« Oxfam a déterminé que l’empreinte carbone annuelle des investissements de seulement 125 des milliardaires les plus riches du monde dans notre échantillon est équivalente aux émissions de carbone de la France, un pays comptant 67 millions d’habitant·es. Cela représente une moyenne de 3,1 millions de tonnes par milliardaire, soit plus d’un million de fois la moyenne des 90 % les plus pauvres de l’humanité avec 2,76 tonnes »

[Source : https://oxfambelgie.be/sites/default/files/2022-11/COP%20Milliardaires%20du%20Carbone.pdf]

L'élite financière vit sur un grand pied, en dilapidant de manière effrénée les ressources de tous, et cela dans une inconscience auto-stimulée via la culture dans laquelle elle baigne et via les fonctionnements et croyances véhiculés dans ces milieux.

La dernière trouvaille en date pour gaspiller son argent tout en faisant éclater son empreinte écologique est le tourisme spatial. Certains au delà des villas pharaoniques, des yachts, des collections de voitures, des tours du monde en jet privé, réservent leur place à plusieurs centaines de milliers de dollars, pour passer 10 minutes dans l'espace -

[Source : https://www.rtbf.be/info/monde/detail_tests-en-cours-pour-10-minutes-dans-l-espace-les-futures-excursions-des-millionnaires?id=10609458].

Autre illustration "anecdotique" pour les curieux : l'utilisation massive de jets privés par une caste richissime qui font ainsi exploser leur empreinte écologique mais qui sont à présent traqués sur le net -

[Source : https://www.rtbf.be/article/le-flight-tracking-des-jets-prives-des-stars-et-milliardaires-nouveau-revelateur-de-linjustice-climatique-11050554].

Et cette consommation effrénée, ce gaspillage généralisé, que l'on justifie en général par la nécessité de "croissance" a pour conséquence les injustices que subissent les couches sociales à la base de la pyramide, et la destruction par tous les biais possibles et imaginables de l'environnement.

3. A l'autre extrême de l'échelle de la richesse, on meurt par millions, dizaines de millions, centaines de millions

« ...la question de la faim aurait dû être résolue depuis longtemps. Depuis les années 1940, on nous promet sa disparition. Ce serait bientôt du passé : Kissinger l’a annoncé à Rome en 1974, elle figurait dans les objectifs du Millenium, d’ici à 2030, il n’y en aura plus, etc. La vérité, c’est qu’il n’y a pas de volonté. Les solutions sont à notre portée. Nous produisons assez de nourriture pour l’ensemble de la planète. C’est la pauvreté qui empêche des millions de gens d’y accéder. »

Martín Caparrós,  interviewé par Isabelle Rüf du journal Le Temps, à propos de son livre « La faim » paru en 2015 -

[Source : https://www.letemps.ch/culture/martin-caparros-rencontre-forcats-faim].

Si l’on prend comme source, les chiffres de la mortalité dans le monde par an sur Wikipedia : près de 57 millions d’individus décèdent annuellement -

[Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Mortalit%C3%A9_dans_le_monde].

Et si l’on se réfère aux chiffres publiés en 2022 par 238 ONG auprès des membres de l’ONU : près de 8 millions d’individus meurent chaque année de faim dans le monde.

[Source : https://www.carefrance.org/actualites/une-personne-meurt-de-faim-toutes-les-quatre-secondes-dans-le-monde-alertent-238-ong/] ;

c’est dès lors près de un décès sur 7 qui est lié à la faim dans le monde.

Après avoir donné les chiffres sur la richesses des uns, je ne vais pas vous épargner non plus avec les chiffres sur la pauvreté et la mortalité des autres. Car il est nécessaire de sortir du déni, et je pense utile de mettre face à face ces deux réalités extrêmes qui sont intrinsèquement liées mais que nous refusons en général de confronter de manière explicite, alors qu'en les mettant face à face, il se pourrait que l'on puisse rétablir un équilibre plus juste, en puisant par vases communiquant la richesse des uns pour la rediriger vers les milieux les plus pauvres, sans mettre en danger de pauvreté ceux dont provient cette richesse.

L’une des règles les plus communes dans notre système financier est qu’il est légal que le patrimoine financier privé d'une seule personne soit supérieur au PIB de plusieurs pays. Alors que l’on sait que ces montants pourraient permettre de sauver des millions de personnes qui mourront de misère dans l'année, ou de sortir des centaines de millions d'autres de la pauvreté. Et pourtant rien n’est fait, ou presque, pour dévier le destin de cet argent et rétablir les chances de survivre dignement pour ces gens. Les plus riches sont considérés comme ceux qui créent de la richesse, de la valeur, de l’emploi, de la croissance ; qui font tourner la baraque d'une certaine manière ; ce qui apparemment justifie leur richesse. Alors, que, si on y réfléchit bien, ce sont eux qui pillent et détruisent la planète.

Un exemple particulièrement frappant de l'énorme décalage de valeurs et références entre les riches et puissants et les simples citoyens, a été révélé de manière flagrante lorsque, au printemps 2019, la cathédrale Notre-Dame de Paris a brûlé. En à peine 4 heures des offres de l’ordre de 100 et 200 millions d’euros chacune, provenant de plusieurs multinationales, ont été mises sur la table pour financer la reconstruction de la cathédrale. Lorsque l’on fait la comparaison avec des actions caritatives comme les « téléthon » en France et « télévie » ou encore le « consortium 12-12 » en Belgique, qui chaque année, rapportent X millions ou dizaines de millions d’euros (fonction de la cause et de la taille du public visé) pendant la durée de l'opération, alors que la participation est proposée à des millions ou dizaines de millions de citoyens dans ces mêmes pays dans le but d’améliorer la vie d’autres citoyens ; le constat ne peut être que choquant. Ce que des dizaines de millions de gens parviennent à rassembler comme dons en plusieurs jours ou semaines, pour sauver d'autres gens ; des multinationales le proposent pratiquement sur un claquement de doigt en à peine quelques heures pour ne sauver personne.

Cela a rendu extrêmement visible le déséquilibre des forces entre ceux qui détiennent la richesse et les autres.

Ces entreprises (leurs dirigeants), en libérant de telles sommes avec une telle rapidité, pour une cause principalement matérielle, prouvent d’une manière un peu impulsive et involontaire sans doute, non seulement qu’elles disposent largement de ces sommes et de bien plus. Mais cela démontre indirectement les valeurs implicites qui sont leur moteur.

Notre système économique a réussi en quelques décennies à faire mourir des centaines de millions de gens.

Le professeur Pogge, de l’université de Yale, cité dans l’article du journal Le Point mentionné sur le site suivant :

[Source : https://www.inter-reseaux.org/ressource/opinion-les-chiffres-de-la-faim-dans-le-monde-sont-a-jeter-a-la-poubelle/] déclare en 2016 que la faim dans le monde a tué 450 millions de personnes en 25 ans. Ce chiffre est monstrueux lorsque l’on sait que la population mondiale était proche de 7,5 milliards d’individus sur la planète en 2016 et qu’en 1991 elle approchait les 5,5 milliards d’individus. Cela signifierait donc que plus d’un être humain sur 15 est mort de faim durant ces 25 années.

Et comme l'on sait que les richesses sont réparties de manière très inégale dans le monde, il est alors évident que dans certaines parties du monde, ce sont un quart, la moitié, voire des communautés entières, qui ont été décimées. Or ces gens ont tout simplement quitté les statistiques de la pauvreté. Plus de 800 millions de personnes souffrent encore de faim dans le monde (contre plus d'un milliard il y a 30 ans – dont 450 millions sont donc décédées).

Et même si le nombre de ceux qui meurent encore actuellement de faim et de malnutrition par an, a baissé de plus de la moitié - à près de 8 millions ; les inégalités ne cessent de croître. (Selon les chiffres publiés lors de l’action de sensibilisation de 238 ONG auprès des membres de l'ONU en 2022 - une personne meurt de faim toutes les 4 secondes -

[Source : https://www.carefrance.org/actualites/une-personne-meurt-de-faim-toutes-les-quatre-secondes-dans-le-monde-alertent-238-ong/].)

Aucune guerre, aucune dictature, aucune pandémie n'a jamais tué autant de gens, et pourtant cela reste planifié. Les objectifs du millénaire visaient en 1990 à éradiquer pour moitié la pauvreté extrême dans le monde pour 2015. Se fixer un tel objectif consiste finalement à planifier de laisser l'autre moitié dans la souffrance et vers la mort.

Pour étayer cette information citée par le Professeur Pogge, j'ai cherché d'autres statistiques sur le net. Malheureusement je n'ai pas retrouvé les chiffres des années '90. On parlait à l'époque de 20 millions de morts par an concernant la faim et la malnutrition. Actuellement (2022-2023), les chiffres diffèrent selon les sources et les années, et les articles mentionnent nettement plus facilement le nombre des millions de personnes menacées de morts, que les chiffres réels de leur disparition. J’ai cité plus haut près de 8 millions (selon 238 ONG), Deux autres sources évaluent le nombre à plus de 9 millions par an.

[Source : https://www.theworldcounts.com/challenges/people-and-poverty/hunger-and-obesity/how-many-people-die-from-hunger-each-year]

et [Source : https://reliefweb.int/report/world/dans-un-monde-dabondance-9-millions-de-personnes-meurent-chaque-ann-e-de-faim-d-clar-le].

Et j’aimerais vraiment attirer l’attention sur le fait que, dans la plupart des articles mentionnant des chiffres concernant la faim dans le monde, on prend en compte les gens souffrant de faim sans mentionner ceux qui sont déjà morts. C’est à mes yeux une forme de déni du problème. Car mathématiquement, cela consiste à minimiser la réalité.

Car le fait que l’on nous répète d’années en années ces statistiques qui varient entre 700 et 900 millions de personnes concernées, sans tenir compte de ceux qui sont morts de faim ou de malnutrition, on fausse le calcul.

Faisons un rapide calcul pour comprendre cette notion, sans prétendre qu’il sera exact vu que en écrivant ceci je ne possède pas les nombres précis et je ne vais pas non plus tenir compte de la croissance démographique. Le but est de suivre le raisonnement pas de parler de chiffres exacts.

Si l’on devait tenir compte d’un nombre de 800 millions d’être humains en détresse liée à la faim dans le monde. Et que ce nombre serait stable sur 10 ans ; cela signifierait que, vu que environ 8 millions de personnes meurent chaque année de faim et malnutrition, le nombre de personnes concernées au bout de 10 ans que l’on pourrait supposé réel (sans tenir compte de la croissance démographique donc) serait de 880 millions, soit de 10 % supérieur à celui mentionné. De la sorte, si le nombre de 800 millions se maintient dans le temps (ce qui n’est pas le cas, je reprécise que je parle de notions, pas de chiffres exacts), cela signifierait que la faim augmente. Mais qu’on n’en tient pas compte, car les morts ont quitté la statistique. Et vu la taille du problème j’avoue ne pas comprendre que ce biais de raisonnement subsiste depuis si longtemps, car excepté le travail du professeur Pogge, je n’ai vu nulle part cette notion mentionnée.

De plus, vu la taille du problème et la fluctuation des nombres selon les années et les sources, il est nécessaire de regarder tous ces chiffres avec une extrême prudence, car personne n'a pu réellement comptabiliser le nombre de morts. La manière de collecter ces données varie d'un pays à l'autre, et la frontière entre la mort des conséquences de la malnutrition ou d'une pathologie ne peut jamais être établie avec 100% de certitude. Ce qui me paraît certains c'est que lorsque l'on atteint des nombres à ce point extrêmes, notre imaginaire est incapable d'en réaliser la teneur dans la réalité. Cela nous dépasse totalement.

Malgré la gravité de la situation, il est toutefois à noter que des chiffres plus fiables permettent d'observer une amélioration de la situation dans les pays où la faim est ou était omniprésente pour une part importante de la population. Car dans ces pays, on peut observer une augmentation notable de l'espérance de vie. Mais l'amélioration moyenne de la longévité dans le monde, équivalente à 24 années de vie, entre 1950 et 2015, ne peut cacher le grand écart qui persiste encore actuellement, vu que cette amélioration est très inégale, et que l'espérance de vie dans certains pays était déjà extrêmement basse en 1950 (27 ans au Mali par exemple, où l'espérance de vie a littéralement doublé, mais ne dépasse actuellement pas 56,2 de moyenne, ce qui reste terriblement bas). Encore actuellement, dans certains pays on vit en moyenne à peine au-dessus de 50 ans (50,1 ans en 2015 pour le Sierra Leone) alors que parmi les pays les plus riches, on vit en moyenne au-dessus de 80 ans.

Voir la page Wikipedia qui donne les statistiques détaillées :

[Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_pays_par_esp%C3%A9rance_de_vie]

Dans son livre, déjà cité, « La faim » (2015), Ed. Buchet Chastel, Martín Caparrós écrit ceci :

« Aucun fléau n’est aussi meurtrier et, en même temps, aussi évitable que la faim. »

[Source : https://www.buchetchastel.fr/catalogue/la-faim/]

Jean Ziegler, ex-rapporteur spécial des Nations unies sur la question du droit à l’alimentation, écrivait dans son ouvrage « Destruction massive », (2011), Ed. du Seuil:

« La destruction, chaque année, de dizaines de millions d’hommes, de femmes et d’enfants par la faim constitue le scandale de notre siècle. Toutes les cinq secondes un enfant de moins de dix ans meurt de faim. Sur une planète qui regorge pourtant de richesses… »

...

« Dans son état actuel, en effet, l’agriculture mondiale pourrait nourrir sans problème 12 milliards d’êtres humains, soit deux fois la population actuelle. Il n’existe donc à cet égard aucune fatalité. ‘’Un enfant qui meurt de faim est un enfant assassiné.’’ »

[Source : https://www.seuil.com/ouvrage/destruction-massive-jean-ziegler/9782021060560]

Dans le même article de la RTBF cité plus haut : « Crise sanitaire et économique : les riches encore plus riches, les pauvres encore plus pauvres » (2021), par N.J., voici ce qu'il en est dit pour les plus pauvres :

« Selon les estimations, la crise sanitaire et son corollaire, la crise économique, ont précipité entre 200 et 500 millions de personnes dans la pauvreté et ce, un peu partout dans le monde. Quand on dit "dans la pauvreté", cela signifie que les personnes en question seraient tombées sous le seuil des 5,50 dollars par jour en 2020. Malheureusement, pour ces personnes-là, la récupération va prendre plus d’une décennie. Parmi ces personnes, on remarque que les femmes ont été massivement touchées par cette double crise sanitaire et économique. »

[Source : https://www.rtbf.be/info/societe/detail_crise-sanitaire-et-economique-les-riches-encore-plus-riches-les-pauvres-encore-plus-pauvres?id=10682005]

Les conséquences de la guerre en Ukraine ont un effet similaire. Non seulement des millions de personnes quittent le pays, des dizaines de milliers meurent au combat, des centaines de millions dans le monde, sont confrontés à la misère et la famine en lien avec la pénurie de céréales, et plus encore tombent dans la pauvreté en lien avec l'inflation bondissante liée à cette guerre, et aux prix explosés de l'énergie.

4. C'est la richesse extrême des plus riches qui maintient la mortalité par millions des plus pauvres

« Les profits générés par les entreprises fossiles en moins de dix-huit jours suffiraient à financer la totalité des appels humanitaires lancés par l’ONU pour 2022. »

selon l’article de l’agence Belga édité par Théa Jacquet de la RTBF, « La faim extrême a augmenté de 123% dans dix des pays les plus fragiles face au réchauffement climatique » (2022) [Source : https://www.rtbf.be/article/la-faim-extreme-a-augmente-de-123-dans-dix-des-pays-les-plus-fragiles-face-au-rechauffement-climatique-11067835]

Il fut un temps où il a fallu comprendre que la terre n'était pas plate, mais ronde, et que nous n'étions pas au centre de l'univers. Nous en arrivons au stade de comprendre que notre planète est limitée et que le « bon père de famille » qui l'a gérée jusqu'à présent, n'est qu'un escroc et que nous sommes tous les petites mains volontaires de cet escroc.

Dans le contexte qui est le nôtre où le système économique est inéluctablement fermé, limité par les capacités que nous offre la planète ; la logique devrait nous faire comprendre que tout enrichissement de quiconque crée bel et bien la pauvreté d'autrui.

Or, si cela a toujours été très injuste, cela n’a jamais été si incohérent et dangereux que actuellement. Et ce ne seront jamais ceux qui établissent et maintiennent un tel système, de qui il faudra attendre un changement de cap. Même si certains expriment malgré tout des intentions louables en ce sens.

Et les plus riches, les CEO, banquiers, rentiers, les cadres supérieurs, tous les gros actionnaires, n'ont pas encore compris qu'ils sont sur la branche qu'ils sont en train de scier et qu'ils sont tout proches du point de rupture, même si la branche semble encore presque intacte à leurs yeux. Ce n'est qu'une question de temps, mais elle rompra.

Quel que soit le bout par lequel on prend le problème, il montre que les riches sont extrêmement riches, sont de plus en plus riches, augmentent leur richesse de plus en plus rapidement, et dilapident de plus en plus le bien commun que sont les ressources sur la planète. Alors que les pauvres sont de plus en plus nombreux, sont maintenus dans cette pauvreté, et pour part d'entre eux, continuent à s'appauvrir. Les plus riches abusent de leurs pouvoirs pour perpétuer cette situation. Et les politiques laissent faire : parce qu'ils bénéficient de l'appui de ces riches financièrement ; et/ou pour garder leur poste ; parce qu'ils sont complaisants, ou encore inconscients ; ou tout cela à la fois. Mais aussi parce qu'ils sont impuissants face à l'inextricable complexité que représentent les systèmes légaux régionaux, nationaux, internationaux et mondiaux, et aussi face à l'absence totale de réglementation dans bien des domaines qui rendent possible aux plus riches de continuer comme ils l'ont toujours fait et de manière de plus en plus extrême. Ce qui signifie que pratiquement rien ne pourra modifier leurs actions et décisions à court terme et que le changement doit venir en grande partie d'ailleurs.

Et la classe moyenne, ni pauvre, ni riche, participe à tout cela, en se soumettant aux règles dictées par les plus riches, alors que pour une bonne part des individus, rien ne les y oblige. Mais c'est bien confortable de profiter de certains avantages, et de se protéger de voir les conséquences que cela produit. Nous déplorons les injustices, mais refusons d'admettre que, insidieusement, nous y participons, en étant complices de ceux qui les initient. Et comme la plupart du temps, cela se passe loin de nous, que la pauvreté et la faim, ne produisent pas de gros fracas relayés par les mass médias ; nous nous contentons de nous indigner furtivement lors d'une famine au bout du monde, et de construire des murs et des barbelés, pour ne pas voir venir ces migrants qui sont les preuves de ce mal de civilisation que nous dénions.

Comme le dit Julien Vidal dans son livre : « Ça va changer avec vous ! », (2019), Editions Pocket :

« Le modèle capitaliste actuel se nourrit des non-dits, de nos compromis mous, de nos oppositions stériles, de notre passivité, de nos incohérences, de nos démissions. »

[Source : https://www.lisez.com/livre-de-poche/ca-va-changer-avec-vous/9782266317092]

Nous reviendrons sur tout cela un peu plus loin dans les chapitres sur « La complaisance des consommateurs » et sur « L'implicite et l'explicite ».

Évaluer les dégâts ne peut nous mener à trouver les solutions qui vont les empêcher de continuer à survenir. Il est nécessaire d'aller chercher ce qui, derrière les apparences, amène à de telles dérives. Et plutôt que de chercher historiquement ce qui peut expliquer les raisons de la situation actuelle, je propose une autre approche plus psychologique ou sociologique. Car ce n'est pas en regardant le passé qu'on parvient à ne pas le reproduire, c'est en regardant les raisons de nos comportements que nous pouvons parvenir à les transformer. Et dans le cadre de la culture du profit nous avons encore beaucoup de choses à découvrir.

 page 2 <<<< page 3 >>>> page 4

 

 

Table des matières

page 1

Remarque préliminaire

INTRODUCTION

page 2

PREMIÈRE PARTIE : POSER LE PROBLÈME – QUE SE CACHE-T-IL DERRIÈRE LES MOTS DE L'ARGENT ET DU PROFIT

A) INTRODUCTION

B) RICHESSE ET PAUVRETÉ FONCTIONNENT PAR VASES COMMUNICANTS DE MANIÈRE SYSTÉMIQUE

C) L'ARGENT - LES RÔLES INDIRECTS ET DÉTOURNÉS QUI LUI SONT ATTRIBUÉS

1. Moyen de subsistance, et bien au-delà

2. La reconnaissance et son exploitation commerciale

3. L'argent n’est pas neutre – pouvoir et autres dérives

4. L’argent donne un statut

D) LE CONCEPT DE PROFIT ET LES VALEURS QUE CELA SOUS-TEND

1. Profit équitable ou profit abusif

2. L'indécence des dividendes - quelques données chiffrées

page 3

E) LES CONSÉQUENCES DU PROFIT ET DES RÔLES INDIRECTS DE L'ARGENT

1. Les conséquences matérielles de l'appât du gain

a - les dérives dans l'industrie : quand la fin justifie tous les moyens

b - Répartition inéquitable de l'argent - Les écarts de richesses

2. la classe la plus riche, de loin la plus destructrice

3. A l'autre extrême de l'échelle de la richesse, on meurt par millions, dizaines de millions, centaines de millions

4. C'est la richesse extrême des plus riches qui maintient la mortalité par millions des plus pauvres

page 4

F) LES CONSÉQUENCES DE L’APPÂT DU GAIN SUR LES MENTALITÉS

1. La survie ou l'avidité

2. L’argent corrompt et pervertit

3. La course pour grimper vers plus de richesses

4. La complaisance des consommateurs

5. La violence

G) LES CROYANCES IMPLICITES CONCERNANT L'ARGENT

1. L'argent doit être une ressource limitée

2. Il faut travailler pour gagner sa vie

3. Les gens riches sont plus heureux

4. La richesse se mérite, donc implicitement la pauvreté aussi

5. Il faut travailler dur pour bien gagner sa vie

6. L'argent gonfle tout seul

7. L'augmentation du coût de la vie, l'inflation, la dévaluation de la monnaie

8. Être riche ne nuit à personne

9. En économie, ce qui est légal est moral

10. L'économie c'est une science, complexe - il faut se fier aux experts

11. Ce sont les politiques qui détiennent le pouvoir

page 5

12. La croissance est bonne pour l'économie

a - Effet logarithmique de la croissance

b - Empreinte écologique et jour du dépassement

c - Démographie

H) LES PRINCIPAUX VÉHICULES DE LA CULTURE DU PROFIT

1. La publicité

2. Les médias de l’information

3. Les réseaux sociaux

4. Les médias du divertissement et en particulier, la télévision

5. La domination masculine

6. La culture et l'éducation

I) L'IMPLICITE ET L'EXPLICITE

J) CONCLUSION

page 6

DEUXIÈME PARTIE : PREMIÈRES IDÉES DE SOLUTIONS : Découpler le travail et l’argent – découpler l’argent du profit

A) INTRODUCTION

B) LES ALTERNATIVES QUI RESTENT A LA MARGE

1. Nous ne sommes pas encore prêts

2. Les solutions font encore partie du problème

C) ABANDONNER NOS CROYANCES SUR LA CROISSANCE, ET BOULEVERSER LA LOGIQUE DE L'EMPLOI

D) DÉCOUPLER TRAVAIL ET ARGENT - L'ALLOCATION UNIVERSELLE

1. Moins de travail à pourvoir

2. Créer la motivation à travailler

3. Conception du travail

4. Financement de l'allocation universelle

5. L'allocation universelle donnerait du pouvoir à ceux qui actuellement n'y ont aucunement accès

E) DÉCOUPLER L'ARGENT DE LA RECHERCHE DE PROFIT

1. Créer une économie qui n'est plus régie par l'argent

- Le rôle des initiatives citoyennes

2. Une seule initiative et l'effet boule de neige

3. Construction de la nouvelle tour

4. Quelques exemples de changements concrets à venir dans la société

a - La démocratie participative

b - Le pouvoir politique se transformera et reprendra du pouvoir face au pouvoir économique et financier

c - Bourse fermée

d - Disparition des impôts

e - Les entreprises démocratiques se multiplieront, voire se généraliseront

page 7

F) DIMINUTION DU RÔLE DE L'ARGENT

1. Evolution des mentalités

2. Le vrai rôle que devrait avoir l'argent

a - Réduire l'utilisation et le rôle de l'argent

b - Apprendre à échanger sans compter

c - La diminution de l'importance de l'argent dans nos vies

TROISIÈME PARTIE : LE CONTEXTE DU CHANGEMENT

A) AU NIVEAU POLITIQUE

B) AMENER LE VIRAGE POLITIQUE VIA LES MOUVEMENTS CITOYENS

C) BALANCE A PLATEAU : ALLER VERS L'ALTERNATIVE

D) NOS PETITS PAS INDIVIDUELS SONT CAPABLES DE GÉNÉRER DE GRANDES MARRÉES CITOYENNES

E) PROFILS DE CITOYENS : LES CONDITIONS POUR CHANGER

page 8

QUATRIÈME PARTIE : LE CHANGEMENT DU NIVEAU DE CONSCIENCE

A) INTRODUCTION

B) LA NÉCESSITE DE PERCEVOIR L'IMPORTANCE DE L’ÉVOLUTION INDIVIDUELLE D'UNE PART IMPORTANTE DE LA POPULATION

1. Qui est en premier concerné

a - Les plus riches

b - Les plus pauvres

c - La classe moyenne

2. De quel changement individuel parle-t-on : tout d’abord, dans le concret

a - La responsabilité d’agir même si on est seul à le faire

b - Et si la notion de goutte d'eau dans l'océan s'avérait totalement fausse ?

c - Cesser de leur donner du pouvoir

d - Liberté - autonomie - solidarité

3. Au-delà des modifications de comportements citoyens ou de consommateur : l'élévation du niveau de conscience

a - Conscience et information

b - Conscience et technologies

c - Conscience et solutions nouvelles

d - Dénouer les nœuds qui sont dans nos têtes

e - Changer la couleur de nos lunettes : changer notre mode de pensée

f - Bousculer l'édifice de nos croyances

g - Saut d'évolution de l'humanité

page 9

4. Dépasser les freins au changement :

a - Sous hypnose : nos doutes, notre passivité, notre conformisme, notre lâcheté

b - Syndrome de Stockholm

c - La difficulté d'aller à contre courant – la soumission à l’autorité de Milgram

d - Mettre des mots sur ce qui est implicite afin d’en éviter les incohérences

e - Quitter notre mentalité va nous faire peur

f - Le choix du pessimisme sous prétexte de réalisme

CINQUIÈME PARTIE : LES DEUX PILIERS PRINCIPAUX DU CHANGEMENT : Privilégier les raisons du cœur au raisonnement cartésien et lâcher le rapport de force

A) QUAND NOS SOLUTIONS MAINTIENNENT LE PROBLÈME TOUT EN LE RENDANT MOINS VISIBLE

B) PRIVILÉGIER LES RAISONS DU CŒUR AU RAISONNEMENT CARTÉSIEN

1. Introduction

2. Nous supposons à tort que toutes nos pensées sont rationnelles par essence (excepté dans la folie ou lors de certains dérapages)

3. Prendre notre rationalité pour seule référence , seul repère, comme seule valable, seule efficace, ...

4. Notre recours à la rationalité nous mène souvent en bateau : une atèle sur une jambe de bois

5. Une solution qui ne porte pas - toute rationnelle qu'elle puisse être - n'est pas une solution

page 10

6. Un enseignement qui reflète tout notre système de pensée rationnelle et ses failles, dans un cadre éducatif qui fait souvent défaut

7. La fiabilité relative du raisonnement scientifique de l'expert - un regard sur le réchauffement climatique

8. Notre incapacité à gérer correctement nos découvertes et inventions scientifiques

9. De nouvelles références pour guider nos choix

C) LÂCHER LE RAPPORT DE FORCE

1. Introduction

2. Le rapport de force

a - En quoi consiste le rapport de force ?

b - Lâcher le rapport de force

c - Nous fonctionnons dans le rapport de force comme nous respirons

d - Les enjeux du rapport de force ou de son absence

e - La violence n'est jamais loin du rapport de force, la non-violence non plus

page 11

f - Comment les rapports de force imprègnent toutes nos conceptions

i La mentalité basée sur le rapport de force

ii Notre incapacité à envisager les conflits en dehors du rapport de force

iii Une société de dominants et de dominés : le rapport de force est partout

iv La soumission

v La désignation d'un fautif

vi rapport de force et confiance en soi

vii rapport de force et libre arbitre

g - Comment les rapports de force définissent notre vie sociale et nos dépenses

i Les comportements, références et marqueurs sociaux résultants de la prégnance généralisée des rapports de force

ii Les sphères d’influence sociales, culturelles et commerciales

iii Rapport de force dans le cadre professionnel

iv Rapports de force et monde virtuel – école de narcissisme

v rapport de force et voiture

page 12

vi Rapports de force, consommation, et recherche de profit sont foncièrement et intrinsèquement liés

- les comportements de survie

- les comportements d'avidité

- notre complaisance

- les comportements de compétition

- les comportements d'exigence

- les comportements de défense de nos privilèges

- les rapports de force ne sont jamais loin de nos comportements de matérialisme et de notre cupidité

vii quitter le rapport de force mène à se désintéresser des richesses et de la consommation

h - Rapport de force à l'échelle collective

3. Connaissance de soi : notre part d'ombre

a - Introduction

b - Rapport de force versus empathie - les deux facettes de l'être humain d'aujourd'hui

i Ambivalence des comportements

- l'attitude face aux inconnus

- l'attitude face à l'entourage

- Un interrupteur dans la tête et l'apprentissage de stratégies pour y remédier

ii Le moment de bascule

- Face aux inconnus

- Face à l'entourage

page 13

iii On ne peut désinvestir nos pensées et émotions dites "négatives" uniquement par le simple choix de penser positif

iv découvrir les effets de l'interrupteur

v apprendre à gérer l'interrupteur

vi la gestion de l'interrupteur sur la durée

vii Accepter notre part d'ombre c'est accepter celle des autres

c - Le capitalisme exploite notre part d'ombre

d - La part d'ombre et le rôle des citoyens en transition

e - La part d'ombre et le rôle des crises

f - Facteurs favorisant ou non la propension à utiliser le rapport de force

i Tout d'abord, notre passé forge en grande partie qui l'on est : notre tempérament, nos conditionnements, nos blessures, nos tendances.

ii Ensuite, c'est notre situation du présent qui va aussi déterminer nos réactions face à l'adversité.

iii Niveau de conscience

g - Notre capacité à l'empathie dépend surtout de notre capacité à reconnaître ce qui nous en éloigne - l'altruisme des religions élude cet aspect

h - Evolution personnelle et déni de réalité

i Fuir totalement l'actualité nous fait perdre contact avec la réalité

ii Quand utiliser la loi de l'attraction devient magique

iii Évoluer dans un monde de bisounours

iv Évoluer spirituellement ne peut pas nous épargner d'adapter de manière intègre nos comportements à la réalité très concrète

page 14

4. Quitter le rapport de force - accueillir notre part d'ombre via un réel travail psychologique

a - L'étape incontournable : commencer par reconnaître notre part d’ombre

b - Part d’ombre et rapport de force

c - Parvenir à déjouer l'emprise négative de certaines de nos émotions et de leurs conséquences sur nos pensées et nos comportements

d - Les attitudes mentales à privilégier

i accepter

ii persévérer à demander

iii Faire évoluer les demandes et propositions en traversant les échecs, en apprenant de nos erreurs

iv Accepter dans certains cas la solution de l'autre qui ne nous satisfait pas, mais peut mener vers nos objectifs

e - Se mettre dans la bonne disposition d'esprit

i La détermination

ii L'absence d'exigence

iii L’absence d’urgence

iv Exploiter l’émotion sans agir sous son emprise

v Une forme de connaissance de soi

vi Le détachement

vii La présence de doutes dans la confiance

viii Le respect et la bienveillance absolue

page 15

f - Quand le rapport de force s’éloigne, l’empathie et la solidarité peuvent apparaître

g - Aller vers le cœur

h - Changer

i - Notre part d'ombre est notre alliée

j - La différence entre la compréhension et la conscience

k - Pour prendre de la perspective

SIXIÈME PARTIE : LES FACTEURS D'INFLUENCE DU CHANGEMENT

1. Deux mondes parallèles

2. Conscientiser, chercher à influencer : c'est se tromper

3. La réelle influence s'opère loin des discours

4. Notre rôle de colibri et son effet boule de neige

5. L’influence des médias de l’information

6. Le rôle des crises

page 16

7. L’éducation et l’enseignement – y compris le rôle qu’y joue le web

8. Le pouvoir de la minorité

9. Catalyseurs d’un autre genre

a - L'intelligence collective

b - Les neurones miroir

c - L’épigénétique

d - La contagion de l'altruisme

e - Les champs morphiques (ou morphogénétiques)

f - La transmission de toutes nos pensées et émotions

g - L'auto-contagion

10. Conclusion

VERS UNE UTOPIE NON DÉCONNECTÉE DE LA RÉALITÉ

- La métaphore du flocon

- Un dernier petit coup de pouce

ANNEXE Un détour par la théorie polyvagale

page 17

ICI COMMENCE LE DEUXIÈME VOLET DE CE LIVRE

RÉFÉRENCES

REMERCIEMENTS